Data

Date:
12-03-2010
Country:
France
Number:
--
Court:
Tribunal de Commerce - Versailles
Parties:
--

Keywords

FUNDAMENTAL BREACH - BUYER'S FAILURE TO TAKE DELIVERY OF PART OF THE GOODS - SELLER ENTITLED TO AVOID (TERMINATE) THE CONTRACT (ART. 64(1)(A) CISG)

RIGHT TO INTEREST (ART. 78 CISG) - INTEREST RATE - DETERMINED BY DOMESTIC LAW OF THE SELLER’S COUNTRY

Abstract

An Italian company (seller) concluded a contract with a French company (buyer) for the supply of one hundred feeders to be used in the manufacture of medical equipment. According to the purchase order, the goods had to be delivered in two instalments at fixed dates. The seller failed to deliver the goods on time; however, it delivered forty feeders two years after the contract had been concluded and the buyer accepted and paid for them. Later on, the seller sued the buyer claiming termination of the contract on account of the buyer’s non-performance and damages. The buyer challenged the seller’s claim alleging that the contract had already been terminated by operation of law on the basis of its standard terms of purchase, and that the subsequent delivery of the forty feeders related to a new contract between the parties.

The Court found that CISG was applicable according to its Art. 1(1)(a) and the parties did not challenge its application.

As to the merits of the case, the Court held that the buyer’s standard terms did not provide for termination of the contract by operation of law in case of late delivery but merely for the buyer’s right to do so. Therefore, as the buyer did not demonstrate that it had notified the seller of its intention to terminate the contract, such contract was still in force when the seller delivered the forty feeders. Moreover, since the buyer unlawfully refused to take delivery of the remaining goods, it had committed a fundamental breach of contract (Arts. 53 and 64 CISG). Consequently, the Court awarded the seller damages according to Art. 74 CISG plus interest (Art. 78 CISG), calculated in accordance with the law of the seller’s country (i.e. Italian law).

Fulltext

DEMANDEUR
STE R… SPA comparant par la SCP Moreau E. & Associés et par le CABINET LELOUP 128 Bd Saint Germain 75006 PARIS

DEFENDEUR
SAS K… M… comparant par Me Dominique Mermillod et par la SCP D… D… & ASSOCIES

COMPOSITION DU TRIBUNAL
En application des dispositions de l'article 869 du code de procédure civile, M. Guy Moreau, Juge Rapporteur, a tenu seul, le 29 Janvier 2010 puis le 12 Février 2010, l'audience pour entendre les plaidoiries ; la clôture des débats a été prononcée le même jour pour (une) décision (devant) être rendue le 12 Mars 2010.
De l'audience de plaidoirie le Juge Rapporteur a rendu compte au Tribunal dans son délibéré composé de M. Denis Lambery de Souza, Président de Chambre, M. Guy Moreau, Juge, M. Xavier Aubry, Juge.
Le jugement a été prononcé à l'audience publique du 12 Mars 2010 par M. Denis Lambery de Souza Président de Chambre, assisté de Me Sophie Gringore, Greffier d'Audience.
Minute signée par M. Denis Lambery de Souza Président de Chambre et Me Sophie Gringore, Greffier d'Audience.

1 - LES FAITS

Par ordre d'achat n° 4500007599 en date du 18/02/04, la Société K… M…, qui fabrique et commercialise du matériel médical électronique et électromagnétique, a commandé à la société de droit italien R…, 100 alimentations de type K002, destinées à la fabrication d'échographes SIGMA 110 et SIGMA 330.
Selon l’ordre d'achat, le prix unitaire des alimentations était de 508,07 € et la livraison était prévue le 15/05/04 pour 30 pièces et le 15/06/04 pour le solde des 70 pièces.

La Société K… M… prétend que la Société R… n'a pas été en mesure de livrer les pièces commandées aux dates fixées dans l’ordre d'achat et qu'en conséquence la commande a été résiliée conformément aux conditions générales d'achat.

Pour sa part, la Société R… affirme que la commande n'a pas été résiliée et est toujours en cours.

C’est dans ces conditions que la Société R… a engagé la présente instance pour réparation du préjudice qu'elle prétend avoir subi en raison, selon elle, de l'inexécution du contrat par la Société K… M…

2 - LA PROCEDURE

Par acte en date du 18/05/09, la Société R… SPA a fait donner assignation à la SAS K… M…, d'avoir à comparaître devant ce Tribunal, le 12/06/09, à l’effet d'entendre celui-ci :
Vu la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11 avril 1980,
Vu l’article 4-2 de la Convention de Rome du 19 juin 1980,
Vu l'article 699 et 700 du CPC.
A. Donner acte à la société de droit italien R… SPA qu'elle résilie le contrat du 18 février 2004 la liant à K… M… en raison de l'inexécution par K… M… en application de l'article 64 de la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11 avril 1980.
B. Condamner la société K… M… à payer à la société de droit italien R… SPA la somme de 33 532,20 € au titre du préjudice provoqué par le manquement de K… M… en application de l'article 74 de la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11 avril 1980, majorée des intérêts au taux légal italien à compter du 15 juin 2004 et avec capitalisation.
C. Condamner la société K… M… à payer â la société de droit italien R… SPA, la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du CPC.
D. Condamner la société K… M… aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais d'exécution forcée.
E. Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir dans toutes ses dispositions.

Par conclusions déposées pour l'audience du 11/09/09, la Société K… M… a demandé au Tribunal de ;
Vu les articles 1134 et suivants du Code civil,
Vu l'article 32-1 du Code de procédure civile,
Constater que :
* R… qui prétend aujourd'hui être créancière de K… M… ne justifie cependant pas avoir respecté les termes de l'ordre d'achat du 18 février 2004 ;
* les conditions générales d'achat prévoyaient une résiliation de plein droit de l’ordre d'achat en cas de non respect des délais
de livraison,
* aucune des cent (100) alimentations commandées n'a été livrée à K… M… les 15 mai 2004 et 15 juin 2004 ;
* l'ordre d'achat du 18 février 2004 a donc été résilié de plein droit à compter du 15 juin 2004 ;
* R… n'est fondée à réclamer aucune somme à rencontre de K… M…;
* la procédure initiée par R… est fondée sur un esprit de lucre, contraire à toute volonté de justice;
En conséquence :
• débouter R… de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;
• condamner R… au paiement d'une somme de cinq mille euros (5 000 €) à titre de dommages et intérêts à titre de procédure abusive ;
• faire application de l'article 32-1 du CPC ;
Et en tout état de cause :
• condamner R… au paiement d'une somme trois mille euros (3.000 €) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;
• ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir;
• condamner R… aux entiers dépens, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

Par conclusions déposées pour l'audience du 04/12/09, la Société R… SPA a réitéré ses précédentes demandes, y ajoutant ; Vu l'article 1382 du Code Civil,
* Débouter la Société K… M… de toutes ses demandes, fins et conclusions.
* Condamner la Société K… M… à payer à la société de droit italien R… SPA la somme de 8 000 € pour procédure abusive sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil

Par conclusions déposées pour l'audience du 29/01/10, la Société K… M… a demandé au Tribunal de :
Vu les articles 1134 et suivants du Code civil,
Vu l'article 32-1 du Code de procédure civile,
CONSTATER que:
- R… qui prétend aujourd'hui être créancière de K… M… ne justifie cependant pas avoir respecté les termes de l’ordre d’Achat du 18 février 2004 ;
- R… ne justifie pas avoir effectivement fabriqué les alimentations aux mois de mai et juin 2004 ;
- R… ne justifie pas des prétendues demandes de reports de livraison de K… M…;
- les conditions générales d'achat prévoyaient une résiliation de plein droit de l'ordre d'achat en cas de non respect des délais de livraison ;
- aucune des cent (100) alimentations commandées n’a été livrée à K… M… les 15 mai 2004 et 15 juin 2004 ;
- l’ordre d'achat du 18 février 2004 a donc été résilié de plein droit à compter du 15 juin 2004 ;
- R… n'est fondée à réclamer aucune somme à l’encontre de K… M… ;
- la procédure initiée par R… est fondée sur un esprit de lucre, contraire à toute volonté de justice ;

EN CONSEQUENCE,
A titre principal :
- prononcer la résiliation de plein droit de l'ordre d'achat du 18 février 2004 à compter du 15 juin 2004 ;
- débouter R… de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner R… au paiement d’une somme de cinq mille euros (5.000 €) à titre de dommages et intérêts à titre de procédure abusive ;
- faire application de l'article 32-1 du Code de procédure civile ;
A titre subsidiaire:
- prononcer la résiliation judiciaire de l'ordre d’achat du 18 février 2004 à compter du 15 juin 2004 ;
- débouter R… de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner R… au paiement d'une somme de cinq mille euros (5.000 €) à titre de dommages et intérêts à titre de procédure abusive ;
- faire application de l'article 32-1 du Code de procédure civile ;
Et, en tout état de cause :
- condamner R… au paiement d'une somme de trois mille euros (3 000 €) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
- condamner R… aux entiers dépens, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Par conclusions déposées au Greffe de ce Tribunal en date du 29/01/10, la Société R… a demandé :
Vu la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11 avril 1980,
Vu l'article 4-2 de la Convention de Rome du 19 juin 1980,
Vu l'article 1382 du Code civil,
Vu l'article 699 et 700 du CPC,

A. Débouter la société K… M… de toutes ses demandes, fins et conclusions,
B. Donner acte à la société de droit italien R… SPA qu'elle résilie le contrat du 18 février 2004 la liant à K… M… en raison de l'inexécution par K… M…, en application de l'article 64 de la convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11 avril 1980,
C. Condamner la société K… M… à payer à la société de droit italien R… SPA la somme de 33 532,20 € au titre du préjudice provoqué par le manquement de K… M… en application de l'article 74 de la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11 avril 1980, majorée des intérêts au taux légal italien à compter du 15 juin 2004 et avec capitalisation.
D. Condamner la société K… M… à payer à la société de droit italien R… SPA la somme de 8.000 € pour procédure abusive sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.
E. Condamner la société K… M… à payer à la société de droit italien R… SPA la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du
Code de Procédure Civile.
F. Condamner la société K… M… aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais d'exécution forcée.
G. Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir dans toutes ses dispositions.

Les parties ont été convoquées pour être entendues en leurs explications par le Juge Rapporteur le 12/02/09.
Elles se sont présentées.
Lors de l'audition, les parties ont déclaré que leurs dernières conclusions reprenaient l'ensemble de leurs demandes et argumentations.
A l'audience du même jour, le Tribunal a prononcé la clôture des débats et mis l'affaire â son délibéré,

3 - LES ARGUMENTS ET MOYENS DES PARTIES
La Société K… M… explique que :
La Société R… n'a pas été en mesure de livrer les pièces commandées aux dates fixées dans l’ordre d'achat du 18/02/04 : 30 pièces le 15/05/04 et 70 les 15/06/04.
Le 04/01/05, la société R… a adressé un courrier à la Société K… M… lui indiquant ne pas être en mesure de pouvoir honorer la commande.
La commande n° 4500007599 en date du 18/02/04 a donc été résiliée de plein droit dés le 15/06/04, conformément aux conditions générales d'achat de la Société K…M…, aux termes desquelles il était expressément prévu que le non respect des délais de livraison était susceptible d'entraîner la résiliation de plein droit de la commande.
Le 16/01/06, soit deux années après, R… a informé la Société K… M… qu'elle était en mesure « de faire parvenir 40 alimentations K002 pendant la semaine 9 ».
La livraison des 40 pièces ayant été acceptée le 19/01/06 par la Société K… M…, celle-ci est intervenue en mars 2006.
Naturellement, et contrairement à ce que tente de faire croire la Société R…, la livraison des 40 alimentations n'est intervenue que dans le cadre d'une nouvelle commande.
Le 26/05/08, soit près de quatre années après la commande, la Société R… n'a pas hésité à réclamer auprès de la nouvelle direction de la Société K… M… le paiement afférent aux 60 pièces commandées le 18/02/04.

La Société RGM répond que :
Le contrat passé entre les sociétés R… et K… M… est régi par la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises (CIVM) et pour toute question non réglée par la CIVM, c'est le droit italien qui est applicable en raison de l'article 4-2 de la Convention de Rome du 19/06/80.

Il convient de rétablir la vérité sur les faits.

1°) C'est à la demande de la Société K… M… que les matériels n'ont pas été livrés le 15 mai et le 15 juin 2004.
La Société K… M… a sollicité téléphoniquement puis par écrit le rééchelonnement des livraisons :
- Le tableau de rééchelonnement joint au courriel du 14/06/04 de la Société K… M… indique une livraison de 10 pièces pour novembre 2004 et de 30 pièces pour décembre 2004.
- Par courriel du 18/10/04, la Société K… M… a sollicité la suspension des livraisons pour 2004 et a précisé qu'elle ignorait ses besoins pour 2005,
La Société K… M… ne produit d'ailleurs aucune pièce dénonçant un quelconque retard de livraison concernant la commande nc 4500007599 en date du 18/02/04.
C'est au contraire la Société R… qui a interrogé la Société K… M… à de multiples reprises pour être informée de la date à laquelle elle pourrait livrer les pièces commandées le 18/02/04 : courriels du 29/11/05, du 16/01/06, du 21/11/07 et LR AR du 26705/08.

2°) La commande n° 4500007599 n'a pas été résiliée de plein droit et est toujours en cours.
- la Société K… M… n'a adressé aucune lettre de résiliation de la commande à la Société R...
- le 14/06704 puis le 18/10/04, la Société K… M… a sollicité des rééchelonnements de la commande n° 4500007599.
- le 04/01/05, la Société R… fait état des problèmes de stock sur ladite commande et la Société K… M… n'apporte aucune contestation.
- le 30/11/05, la Société R… demande un planning pour 2006.
- le 19/01/06, la Société K… M… donne instruction à R… de mettre en production « 40 pièces de la commande n° 4500007599 ».
- en mars 2006, la Société K… M… réceptionne les 40 pièces et paie la facture de R...
- le 16/06/08, dans sa LR AR, la Société K… M… ne fait aucune allusion à une résiliation pour refuser le paiement des 60 alimentations restantes.
Par ailleurs, la clause de résiliation, prévue aux conditions générales, n'est pas une clause de résiliation de plein droit, d'une part, la mention « de plein droit » n'y est pas faite et, d'autre part, la clause ne prévoit pas une résiliation automatique mais seulement un droit pour la Société K… M… de résilier: c'est une simple clause de résiliation unilatérale,

3°) La livraison des 40 pièces intervenue le 02/03/06 correspond bien à la commande n° 4500007599 et n'est pas une commande différente.
- le courriel du 19/01 /06 mentionne bien la commande n° 4500007599.
- la facture correspondante du 15/03/06 comporte les références exactes de la commande du 18/02/04.
Le préjudice
Les pièces commandées par K… M… n'étant pas standard, R… ne peut vendre à un autre client les 60 pièces dont K… M… n'a pas pris livraison. Pour honorer la commande passée par K… M… et dont la livraison était initialement prévue en 2004, R… a dû acheter les matériaux nécessaires à la fabrication des pièces commandées par K… M… et les stocker.
Il est donc sollicité :
- Au titre du gain manqué et en application de l’article 74 de la CIVM :
30 484,20 € (508,07 € x 60), prix que R… pouvait légitimement attendre du contrat mais qui ne lui a pas été payé.
- au titre des peines et soins entraînés par le manquement de K… M… (stockage, assurance du matériel, relances) :
3,048 € (soit le 1/10émc du prix).
- les intérêts au taux légal italien à compter du 15 juin 2004, date à laquelle le contrat aurait dû être exécuté dans sa totalité et en application de l'article 78 de la CIVM et de l'article 4-2 de la Convention de Rome.

4 - SUR CE

Sur la résiliation de la commande n° 4500007599 du 18/02/04 à la date du 15/06/04
Attendu que la Société K… M… prétend que la commande n° 4500007599 en date du 18/02/04 a été résiliée de plein droit dès le 15/06/04, en raison de l’absence de livraison des 100 alimentations et conformément aux conditions générales figurant au verso de l’ordre d'achat :
« En cas de retard, nous nous réservons le droit de résilier la commande pour les matières ou objets restant à livrer, le fournisseur étant expressément d'accord avec nous pour que la seule échéance de la date de livraison nous donne ce droit sans qu'il soit nécessaire d'adresser aucune mise en demeure » ;

Attendu que la clause résolutoire prive le Juge de son pouvoir d'appréciation même s'il s'agit d'un manquement très léger, mais que la jurisprudence de la Cour de cassation impose que la clause résolutoire qui dispense le créancier de l’obligation de recourir au juge, doit exprimer, de manière non équivoque, la commune intention des parties de mettre fin de plein droit à leur convention ;

Attendu qu'en espèce, une clause prévoyant simplement la résiliation en cas d'inexécution sans préciser « de plein droit » est équivoque car elle peut n'être qu'un rappel de l'article 1184 du Code civil;
Qu'il existe en effet de véritables clauses résolutoires « de plein droit », avec ou sans mise en demeure préalable, et d'autres «fausses clauses résolutoires expresses » qui se bornent à prévoir la possibilité de faire prononcer la résolution pour défaut d'exécution du contrat et rappeler ainsi l’article 1184 du Code Civil ;
Que de surcroît, la Société K… M… ne justifie pas, dans l’ensemble des pièces remises aux débats, avoir utilisé la possibilité que lui offrait la clause mentionnée dans les conditions générales, citée supra, et notamment, comme elle en avait l’occasion dans sa LR AR du 16/06/08 faisant le point sur les événements principaux intervenus entre les deux sociétés, et dans son courriel du 01/08/08 pour essayer de trouver un compromis possible ;

Qu'en conséquence, l'affirmation de la Société K… M… est inopérante et la commande n° 4500007599 en date du 18/02/04 est bien restée en cours après la date du 15/06/04.

Sur l'inexécution du contrat
Attendu que chacune des sociétés rejette sur l’autre l’inexécution du contrat : la Société K… M… prétend que la Société R… n'a pas satisfait à son obligation de délai pour la livraison des 100 alimentations, la Société R… affirmant quant à elle que la Société K… M… a refusé la livraison des 60 alimentations restant à livrer ;

Attendu qu'il est remis aux débats :
- un courriel du 14/06/04 de la Société K… M… à la Société R… intitulé «recadencement des Alim's», indiquant une demande de livraison :
o de 55 alimentations, solde de la commande précédente n° 4500007376,
o de 10 alimentations pour novembre 2004 et de 30 alimentations pour décembre 2004, pour la commande n° 4500007599,
- un courriel du 18/10/04 de la Société K… M… à la Société R… modifiant le planning précédent, précisant « ses besoins en alim Sigma » :
o pour l’année 2004, soit 31 alimentations de la commande précédente n° 4500007376 et, aucune pour la commande n°4500007599,
o pour l'année 2005, aucune prévision («Je ne sais pas encore comment schéduler le reste pour 2005 ») ;
Qu'au cours des débats, la Société K… M… a expliqué, sans justifier son absence de relance du fournisseur sur les prétendus retards, que le « recadencement » demandé a été effectué à la demande de la Société R… ; que cette interprétation peu évidente à la lecture du premier courriel (report de la commande précédente, décalage important sur la nouvelle commande et besoin très réduit), devient totalement improbable â la lumière du deuxième courriel en date du 18/10/04 ;

Attendu de surcroît que les courriels suivants confirment le refus de la Société K… M… d'accepter la livraison complète de la commande n°4500007599:
- par courriel du 29/11/05, c'est la Société R… elle-même qui interroge la Société K… M… sur l'avenir de la commande n° 4500007599:
« ...nous vous demandons de bien vouloir prendre une décision à propos de la commande n° 4500007599 de février 2004 dans les prochains jours.
On voudrait recevoir un delivery planning irrévocable pour l'année 2006 pour les 100 alimentations ou bien vous chiffrer toutes les matières dans l'état actuel et les livrer avant la fin de cette année » ;
- par courriel du 16/01/06, la Société R… interroge la Société K… M… :
« J'attends votre OK pour démarrer la production » ;
- en réponse, par courriel du 19/01/06, la Société K… M… mentionne :
« Vous avez mon accord pour lancer ces 40 pièces de la commande 4500007599 »
- par courriel du 21/11/07 intitulé «Facturation commande 4500007599 », la Société R… précise :
«Comme vous êtes bien au courant nous avons depuis longtemps toutes les pièces pour assembler le solde de la commande en objet.
Cette commande, émise à février 2004 et avec échéance moitié de juin 2004 est encore ouverte pour 60 pièces.
Désormais ça fait plusieurs années que nous avons ce (sic) valeur en magasin, cette situation n 'est plus acceptable » ;

Attendu que la Société K… M… prétend que son accord pour le lancement de 40 alimentations correspond à une commande distincte de l'ordre d'achat du 18/02/04 ; que cependant cette affirmation est inopérante, chacun des courriels mentionnés supra fait référence à la commande 4500007599 et de surcroît, comme la Société K… M… le reconnaît elle même dans ses écritures, elle a réceptionné et payé les 40 alimentations, la facture du 15/03/06 mentionnant bien la commande 4500007599 ;

Attendu que la Société K… M… fait état d'un courrier de la Société R… en date du 04/01/05 pour prétendre que cette dernière était dans l'impossibilité de lui livrer les pièces commandées : «Du moment que nous ne pouvons pas produire le solde de votre commande et le tenir dans notre magasin en attendant votre demande périodique, nous vous prions de nous contacter trois mois en avance afin d'organiser notre production et bien satisfaire par temps votre besoin éventuel » ;
Que ce courrier est sorti de son contexte et traduit simplement le refus de la Société R… de stocker des matériels ou des sous-ensembles dans l'attente d'une acceptation de livraison ;

Attendu qu'en réponse à la LR AR en date du 26705/08 de la Société R… relative à la facturation du solde de la commande n°4500007599, la Société K… M… oppose un refus de facturation prétendant que « le nouveau propriétaire de K…M… n 'a aucune responsabilité » et que « les pièces se référant à la commande 4500007599 sont relatives à du matériel complètement obsolète et non utilisable par K… M… » ;

Attendu qu'il s'agit d'une vente commerciale internationale, régie par la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises (CIVM) ; que les parties ne contestent pas l’application de cette convention au présent litige ;
Que l'article 64 de ladite Convention dispose ;
« Le vendeur peut déclarer le contrat résolu :
a) si l Inexécution par l'acheteur de l'une quelconque des obligations résultant pour lui du contrat ou de la présente Convention
constitue une contravention essentielle au contrat ;
b) ... »
Que l'article 53 précise :
« L'acheteur s'oblige, dans les conditions prévues au contrat et par la présente Convention, à payer et à prendre livraison des marchandises » ;

Qu'en conséquence, estimant que la Société K… M… n'a exécuté que partiellement ses obligations liées au contrat de février 2004, le Tribunal donnera acte à la Société R… de la résiliation du contrat du 18/02/04 la liant à la Société K… M… à la date du 18/05/09, date de l'assignation, en application de l’article 64 de la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11/04/80.

Attendu que du fait de l'inexécution partielle du contrat par K… M…, la Société R… a été privée du prix contractuel que K… M… s'était engagée à payer pour 60 pièces restantes ;

Attendu que l'article 74 de la CIVM dispose que :
« Les dommages-intérêts pour une contravention au contrat commise par une partie sont égaux à la perte subie et au gain manqué par l'autre partie par suite de la contravention. Ces dommages-intérêts ne peuvent être supérieurs à la perte subie et au gain manqué que la partie en défaut avait prévus ou aurait dû prévoir au moment de la conclusion du contrat, en considérant les faits dont elle avait connaissance ou aurait dû avoir connaissance, comme étant des conséquences possibles de la contravention au contrat » ;

Qu'en conséquence, le Tribunal, considérant que les dépenses occasionnées par le stockage et la gestion des éléments non standard des alimentations seront compensées par le prix des éléments qui auront été récupérés (et non de la demande de paiement du l/10ème du prix), condamnera la Société K… M… à payer à la Société R… à la somme de 30 484,20 6 (60 alimentations au prix unitaire de 508,07 €), en sus les intérêts au taux légal italien à compter du 18/05/09, date de l'assignation.

Sur l’anatocisme
Attendu que la mesure est sollicitée ;
Que la date de départ des intérêts est le 18/05/09 ;
Qu'une année entière se sera écoulée le 18/05/10 ;
Que la demande de capitalisation a été donnée le 18/05/09 ;
Qu'en conséquence, le Tribunal ordonnera la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code Civil, la 1ère capitalisation intervenant le 18/05/10 et les capitalisations ultérieures au 18 mai de chaque année jusqu'à parfait paiement.

Sur la demande de dommages et intérêts
Attendu que la Société R… a demandé la condamnation de la Société K… M… à lui payer la somme de 8 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, mais qu'elle ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui qui sera compensé par la condamnation qui sera prononcée ;
Qu'elle sera déboutée de sa demande à ce titre.

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts
Attendu que la Société K… M… a demandé la condamnation de la Société R… à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, mais que le Tribunal dira bien fondée la procédure engagée par la Société R… et que celle-ci ne peut être qualifiée d'abusive et qu'ainsi, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 32-1 du CPC;
Qu'en conséquence, le Tribunal recevra la Société K… M… en ses demandes reconventionnelles de dommages et intérêts, l'y déclarera mal fondée et l’en déboutera.

Sur la demande au titre de l’article 700 du CPC :
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la Société R… la totalité des frais irrépétibles qu'elle a dû engager pour faire valoir ses droits dans la présente instance,
Que le Tribunal condamnera la Société K… M… à payer à la Société R… la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du CPC.
Sur l'exécution provisoire
Attendu que l'application de cette mesure est compatible avec la nature de l'affaire et que la mesure apparaît nécessaire au Tribunal, celui-ci l'ordonnera sans constitution de garantie.

Sur les dépens :
Attendu que les dépens seront mis à la charge de la Société K… M… qui succombe.

5 - PAR CES MOTIFS

Le Tribunal :
- Donne acte à la Société R… SPA de la résiliation du contrat du 18/02/04, la liant à la SAS K… M…, à la date du 18/05/09 en application de l'article 64 de la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11/04/80.

- Condamne la SAS K… M… à payer à la Société R… SPA la somme de trente mille quatre cent quatre vingt quatre euros vingt centimes (30 484,20 6), en sus les intérêts au taux légal italien à compter du 18/05/09.
- Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du Code Civil, la 1ère capitalisation intervenant le 18/05/10 et les capitalisations ultérieures au 18 mai de chaque année jusqu'à parfait paiement.
- Dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts,
- Reçoit la SAS K… M… en ses demandes reconventionnelles, l’y dit mal fondée, l’en déboute.
- Déboute la SAS K… M… de ses autres demandes.
- Condamne la SAS K… M… à payer à la Société R… SPA la somme de deux mille cinq cents euros (2 500 €) an titre de l’article 700 du CPC.
- Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.
- Condamne la SAS K… M… aux dépens dont les frais de Greffe s'élèvent à la somme de quatre-vingt euros quatre-vingt cinq centimes (80.85 € TTC).}}

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