Data

Date:
28-01-2009
Country:
Switzerland
Number:
C1 08 45
Court:
Tribunal cantonal du Valais
Parties:
--

Keywords

INCOTERMS - APPLICABLE UNDER THE CONVENTION NOT ONLY WHEN EXPRESSLY AGREED TO BY THE PARTIES, BUT ALSO IN SO FAR AS AMOUNTING TO USAGES WIDELY KNOWN AND REGULARLY OBSERVED AT INTERNATIONAL LEVEL (ART. 9 CISG).

CURRENCY OF PAYMENT - TO BE DETERMINED ACCORDING TO THE OTHERWISE APPLICABLE LAW (ART. 7 CISG).

EXCHANGE RATE LOSS - RECOVERABLE UNDER CISG (ART. 74 CISG).

BURDER ON PROOF - MATTER NOT EXPRESSLY SETTLED BY THE CONVENTION - TO SETTLED ACCORDING TO THE CONVENTION'S GENERAL PRINCIPLE (ART. 7(2) CISG)

RIGHT TO INTEREST IN CASE OF SUMS IN ARREARS (ART. 78 CISG) - INTEREST RATE - TO BE DETERMINED ACCORDING TO THE OTHERWISE APPLICABLE LAW

Abstract

A Swiss manufacturer of sports articles placed several orders with a German seller for the supply of fiberglass. A dispute arose between the parties as the buyer refused to pay the amount indicated in three different invoices issued by the seller.

The Court ruled that CISG was applicable pursuant to its Art. 1(1)(a).

As to the merits, the Court first of all dismissed the buyer's contention that it was entitled to set-off its debt towards the seller for the price (relating to one of the invoices) with a claim for customs duties it had to pay. In reaching such a conclusion, the Court considered that the relevant invoice contained the indication "INCOTERMS: DDU (buyer's place of business)" and that, under the Convention, INCOTERMS can be applied not only when the parties have expressly agreed to do so (Art. 9(1) CISG), but also in the absence of an express agreement, as they amount to usages widely recognized and regularly observed in international trade (Art. 9(2) CISG). In the case at hand, the application of the DDU term was justified not only because the use of INCOTERMS was proven to be an established practice between the parties, but also because such a term represented a binding usage within the meaning of Art. 9(2) CISG. As a result, since the DDU term does not require the seller to pay the customs duties, such costs had instead to be borne by the buyer.

Secondly, the Court upheld the seller's claim for the recovery of the exchange rate loss it had suffered due to the buyer's delay in paying two of the invoices, noting that when the debtor is obliged to pay in a currency different from the legal currency of the creditor's place of business, the exchange rate loss is recoverable under CISG. In this respect, the Court considered that, absent an express provision on the currency of payment in the Convention, that currency must be determined according to the otherwise applicable law (i.e., German law).

Moreover, the Court found that the seller was not entitled to obtain payment for the last invoice addressed to the buyer, since it had failed to provide evidence that the goods had actually been delivered. In reaching such a conclusion, the Court noted that, although CISG does not contain any rule on the burden of proof, it indirectly provides for such a burden to be placed on the party asserting a right against the other party.

Lastly, the seller was granted interest on the sums in arrears (Art. 78 CISG), at the interest rate determined according to the otherwise applicable law (i.e., German law).

Fulltext

I. Statuant en fait

1. a) A, de siège social à K en Allemagne, est une société en commandite, active, notamment, dans la vente de matériaux composites.
B, de siège social à Z, a pour but la conception, la fabrication, la vente et la commercialisation de planches à voile et autres articles de sport.
b) A des dates qui ne ressortent pas des actes de la cause, B a passé plusieurs commandes à A.
aa) A la suite d'une livraison de fibre de verre, la demanderesse a, le 8 mai 2001, signifié à la défenderesse la facture n° 911093, d'un montant de 1408,53 euros, qui comportait l’indication suivante: « INCOTERMS: DDU Z ». B a payé le montant réclamé. Elle s'est, en outre, acquittée de droits de douane d'un montant de 780 fr.
bb) Après lui avoir fourni d'autres matériaux, la demanderesse a, le 20 juin 2001, adressé à la défenderesse la facture n° 911435, d'un montant de 17'873,17 euros, payable dans un délai de soixante jours net, qui expirait le 19 août 2001 (p. 11 : "payable net to: 19.08.2001"); ce document contenait l'indication suivante: "INCOTERMS: EXW K". Le 20 juin 2001 également, A a signifié à B la facture n° 911447, non déposée en cause, d'un montant de 342 euros.
Le 3 décembre 2001, la défenderesse a payé à la demanderesse le montant de 25'750 francs. Interpellée le lendemain sur les motifs pour lesquels elle avait réduit le prix réclamé, B a, par fax du 10 décembre 2001, indiqué qu'elle avait déduit de la somme de 18’215,17 euros (17'873,17 euros + 342 euros) le montant de 535 euros, en compensation des droits de douane relatifs à la facture n° 911093. Elle a, par la suite, expliqué que, au moment de la commande, la demanderesse était en rupture de stock, de sorte qu'elle avait été contrainte d'importer la fibre de verre d'Afrique du Sud, se qui avait donné lieu au prélèvement d'une taxe douanière. D'ordinaire, la marchandise était expédiée d'Allemagne en Suisse et ne faisait pas l'objet de droits de douane.
La demanderesse prétend que le paiement tardif des factures n° 911435 et n° 911447 a généré une perte de change de 255,02 euros.
cc) Le 2 novembre 2001, la demanderesse a adressé à la défenderesse la facture n° 912648, d'un montant de 5’808,25 euros, qui contenait la mention suivante : « INCOTERMS: DDU Z ». B soutient n'avoir jamais reçu la marchandise dont il y est fait mention, raison pour laquelle elle ne s'est pas acquittée du montant réclamé.
Il ressort de la facture du 2 novembre 2001 que l’acheminement des matériaux a été effectué, à une date non indiquée, par le transporteur [...] (« dispatch: by forwarder »; « forwarder: H »). A a déposé en cause le "bon de livraison" établi, le 28 juin 2001, par la H, à E (pièce 11). L'intitulé de ce document - "Ausfuhrbescheinigung fuer Umsatzsteuerzweck bei der Ausfuhr durch einen Spediteur oder Fachtfuehrer" - et les normes citées indiquent plutôt qu'il s'agit d'une pièce destinée à des fins fiscales, soit à attester que la marchandise a été exportée par un voiturier et qu'elle n'est pas soumise à la TVA en Allemagne. Nonobstant la finalité réelle du prétendu "bon de livraison", celui-ci n'est pas propre à établir que la marchandise livrée est bien celle indiquée sur la facture du 2 novembre 2001, puisque, d'une part, il n'est pas signé par le destinataire, et, d'autre part, les articles mentionnés sur ces deux pièces ne sont pas identiques. Il est, en outre, peu vraisemblable que la demanderesse n'ait facturé des marchandises livrées au mois de juin 2001 que quoique quatre mois plus tard. Au surplus, la commission rogatoire exécutée en Allemagne n'a pas permis d'infirmer ces constatations. Dès lors, le "bon de livraison" ne constitue pas la preuve de celle-ci.

II. Considérant en droit

2. Eu égard a l’élément d'extranéité que constitue le siège allemand de la demanderesse, le présent litige est de nature internationale (RVJ 1994 p. 172 consid. 1a; Knoepfler/Schweizer/Othenin-Girard, Droit international privé suisse, 3e éd., 2005, n° 19). Partant, il convient d'examiner la question du conflit de juridictions et celle du droit applicable.
a) L'article 1er al. 2 LDIP réserve les traités internationaux en matière de compétence internationale, et notamment la Convention de Lugano, du 16 septembre 1988, concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (ci-après: CL), entrée en vigueur entre la Suisse et l'Allemagne le 1er mars 1995 (art. 61 al. 3 CL). La demanderesse, dont le siège social est à [...] ayant introduit action contre la défenderesse, domiciliée à [...], la CL est applicable (art. 54 al. 1 CL; ATF 119 II 391 consid. 2; RVJ 1995 p. 164 consid. 1a).
En vertu de l'article 2 al. 1 CL. les personnes domiciliées sur le territoire d'un Etat contractant sont, sous réserve de dispositions contraires, attraites, quelle que soit leur nationalité, devant tes juridictions de cet Etat. S'agissant d'une disposition qui détermine uniquement la compétence générale, elle ne précise pas quel tribunal suisse est territorialement compétent; à cette fin, l'article 112 LDIP demeure applicable. Ce dernier prévoit en premier lieu la compétence des tribunaux suisses du domicile du défendeur (Bucher/Bonomi, Droit intemational privé, 2e éd., 2004, n° 887).
En l'espèce, la défenderesse a son siège social à Z, en sorte que les autorités judiciaires ordinaires du canton du Valais sont compétentes à raison du lieu.
b) Déterminée par les conclusions de la demande, la valeur litigieuse est de 6’598,30 euros, soit, au cours du jour de l'ouverture d'action, de 10'171 fr. 95 (taux: 1,5416; ATF 63 II 64; Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, Vol. I, Art 1-40, 1990, ch. 3.3 et 6 ad art. 36 aOJ). Elle fonde la compétence du Tribunal cantonal pour juger la présente affaire en première et unique instance cantonale (art. 15 al. 1 CPC et 23 al. 1 let. b aCPC en relation avec l'art. VI al. 3 a contrario du Décret du 11 octobre 2006 modifiant la législation cantonale en matière de procédure civile pour l'adapter à la loi fédérale sur le Tribunal fédéral). En vertu de l'article 23 al. 5 let. b CPC, un juge unique est, en outre, habilité à statuer (art. 23 al. 5 let. b CPC en relation avec l'art. IX ch. 7 de la Loi modifiant le droit judiciaire du 9 novembre 2006).
3. La demanderesse déduit ses prétentions des dispositions relatives à la vente internationale de marchandises.
a) D'après l'article 1er al. 1 let. a de la convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises du 11 avril 1980 (ci-après: CVIM), le traité s'applique aux contrats de vente de marchandises entre des parties ayant leur établissement dans des Etats différents, lorsque ces Etats sont des Etats contractants. La CVIM, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1991 pour l'Allemagne et le 1er mars de la même année pour la Suisse, régit exclusivement la formation du contrat de vente et les droits et obligations qu'un tel contrat fait naître entre la vendeur et l'acheteur (art. 4, 1er phrase, CVIM). En revanche, sauf disposition contraire expresse, la CVIM ne concerne pas la validité du contrat ni celle d'aucune de ses clauses non plus que de celle des usages (art. 4 let. a CVIM). Les matières non régies par la CVIM restent soumises au droit applicable en vertu des règles de droit international privé (Venturi, Commentaire romand, 2003, n. 10 ad intro aux art. 184-215 CO; Werro, La responsabilité du vendeur dans le commerce international et dans le marché intérieur, in: SJ 2002 p. 291 s).
La vente, au sens de la CVIM, se définit comme un contrat par lequel une partie s'engage à livrer une chose, à en transférer la propriété et, le cas échéant, à remettre les documents s'y rapportant alors que l'autre s'engage à en payer le prix et à en prendre livraison (RSDIE 2002 p. 148 s; Neumayer/Ming, Convention de Vienne sur les contrats de vente internationale de marchandises: commentaire, 1993, n. 1 ad art. 1 CVIM). Les articles 14 à 24 CVIM traitent de la formation du contrat de vente: si une offre est suffisamment précise, qu'elle a été acceptée par son destinataire et que la déclaration d'acceptation est parvenue en retour à son auteur, le contrat est réputé conclu.
b) En l’espèce, les parties n'ont pas déposé en cause les documents d'offres et d'acceptations. Il n'est cependant pas contesté que la défenderesse a commandé, à plusieurs reprises, des marchandises à la demanderesse. Les parties - qui ont leur établissement dans des Etats contractants - ont donc conclu plusieurs contrats de vente, soumis à la CVIM.
4. a) La demanderesse réclame d'abord le montant de 535 euros, "indûment retenus" par la défenderesse lors du paiement des factures n. 911447 et 911435 du 20 juin 2001. La défenderesse invoque en compensation des droits de douane dont elle prétend s'être acquittée à tort (cf. au sujet de la possibilité de compenser des créances résultant de contrats de vente internationale de marchandises, arrêt non publié 4C.314/2006 du 20 décembre 2008 consid. 2.2.1; RSDIE 2006 p. 202; RSDIE 2005 p. 119).
aa) Les obligations du vendeur sont définies aux articles 30 ss CVIM. Ces articles sont toutefois de nature dispositive, de sorte qu'ils ne s'appliquent que si les parties n'ont pas réglé les modalités liées à la livraison, expressément ou implicitement -conformément à leurs usages ou habitudes (art. 8 CVIM) - ou en référence à des termes commerciaux comme les Incoterms (RVJ 2006 p. 181 consid. 5a; Brunner, UN-Kaufrecht-CISG, 2004. n. 2 ad art. 30 CVIM; Venturi, op. cit., n. 59 ad art. 184 CO). Les Incoterms sont les règles officielles édictées par la Chambre de Commerce internationale (ci-après : CCI) pour l'interprétation des termes les plus répandus dans le commerce international. Ils règlent quatre types de problèmes relatifs a la vente: la livraison des marchandises, le transfert des risques, la répartition des frais et les formalités douanières (Neumayer/Ming, op. cit., n. 7 ad art. 9 CVIM). Le renvoi à ces régles peut se faire par la mention du titre complet de la clause-Incoterm choisie ou par l'utilisation de l'abréviation de la clause topique, constituée de trois lettres- Lorsque les parties n'ont pas précisé à quelle édition des Incoterms elles se réfèrent, est déterminante la dernière version en vigueur au moment de la conclusion du contrat (Brunner, op. cit., n. 19 ad art. 30 CVIM).
Les Incoterms ne s'appliquent, en principe, qu'en cas d'accord exprès et précis des parties, à moins qu'il existe une pratique usuelle à ce sujet entre elles (cf. art. 9 al. 1 CVIM; Erdem, La livraison des marchandises selon la Convention de Vienne. thèse Fribourg 1990, n° 445). Le recours à ces règles, en l’absence d'accord des parties, peut en outre intervenir sur la base de l'article 9 al. 2 CVIM, compte tenu de leur caractère d'usage largement reconnu et régulièrement observé dans le commerce international, à condition toutefois que l'Incoterm à appliquer ressorte du contrat (Brunner, op. cit., n. 19 ad art. 8 et 11 ad art. 30 CVIM et les réf. aux arrêts cités à la note de bas de page n° 683; Xueref, Les Incoterms 1990, in: Dessemontet [éd.]. Les contrats de vente internationale de marchandises, 1991, p. 154 s.; contra: Neumayer/Ming. op. cit., n. 7 ad art. 9 CVIM, pour lesquels les Incoterms ne constituent pas des usages). Enfin, même lorsque les Incoterms n'ont pas été intégrés - explicitement ou implicitement - au contrat, ils ont valeur de règles d'interprétation (Brunner, op. cit., n. 19 ad art. 8, n. 2 ad art. 9 et n. 11 ad art. 30 CVIM).
Selon l'édition 2000 des Incoterms, le terme « EWX » (« ex works », "à l'usine") n'impose au vendeur qu'une obligation minimale: il doit simplement mettre la marchandise à disposition de l'acheteur au lieu de livraison convenu, en général dans ses propres locaux (Brunner. op. cit., p. 587 ss). Quant au terme "DDU" ("delivered duty unpaid", "rendu droits non acquittes"), il signifie que le vendeur satisfait à son obligation de livraison lorsqu'il fournit à l'acheteur, par tout véhicule de transport à destination, la marchandise non déchargée et non dédouanée à l'importation (Brunner, op. cit., p. 873 ss). Dans ce cas, la livraison s'effectue après l'opération de transport; l'acheteur obtient, à ses frais et risques, toute licence d'importation ou autre autorisation officielle et accomplit toutes formalités nécessaires à l'importation (Erdem, op. cit., n. 282 et 321).
Il convient encore de relever que la référence à des usages ou termes commerciaux comme les Incoterms n'exclut pas la CVIM dans son entier, mais seulement en ce qui concerne les domaines régis par les termes ou usages désignés (Neumayer/Ming, op. cit., n. 4 ad art 6 CVIM).
bb) En l'espèce, la défenderesse ne conteste pas le montant total de 18’215,17 euros faisant l'objet des factures n. 911447 et 911435. Elle soutient, en revanche, qu'elle était autorisée à déduire 535 euros, en compensation de droits de douane dont elle s'est acquittée, à tort, lors d'une livraison de fibre de verre.
La taxe douanière litigieuse a été prélevée lors de la livraison des marchandises ayant fait l'objet de la facture n° 911093 du 8 mai 2001 (pièce 9). Les parties n'ont pas déposé en cause les documents d'offre et d'acceptation relatifs à cette commande, ni d'éventuelles conditions générales applicables entre elles, bien que plusieurs factures fassent référence à des conditions générales de livraison et de paiement du 12 juin 1997. Elles n'ont pas non plus établi le contenu de leur accord concernant ces taxes; les allégations de la défenderesse au sujet de précédentes livraisons ne sont en particulier pas étayées par des indications et des pièces précises permettant de retenir qu'il incombait à la demanderesse d'assumer ces droits de douane. En revanche, il ressort des différentes factures versées en cause que le recours aux règles officielles édictées par la CCI (Incoterms) est une pratique usuelle entre elles. La facture du 8 mal 2001 n'y déroge pas et fait mention d'un Incoterm précis, de sorte que les parties ont entendu spécifier les modalités de la livraison par renvoi aux règles de la CCI. Au surplus, la désignation d'un Incoterm particulier et le caractère d'usage commercial largement reconnu et régulièrement observé dans le commerce international de ces règles justifient leur application au cas d'espèce.
La question de savoir quelle partie devait assumer la taxe douanière litigieuse doit dès lors être résolue au regard de la mention « DDU Z », figurant dans la facture du 8 mai 2001. Est déterminante, à défaut d'indication expresse à ce sujet, l'édition 2000 de ces usages commerciaux. Il s'ensuit que l'obligation de la demanderesse consistait à fournir la marchandise, non dédouanée, à la défenderesse. C'est partant à tort que celle-ci a déduit le montant de 535 euros des factures n. 911447 et 911435 et elle doit par conséquent être condamnée à le payer à la demanderesse.
b) La demanderesse allègue ensuite avoir subi un dommage, sous la forme d'une perte de change, à hauteur de 255,02 euros, consécutive au retard de la défenderesse dans le paiement de ses factures n. 011447 et 911435 du 20 juin 2001. Ce faisant, elle sous-entend que, si elle avait été payée à l'échéance, elle aurait immédiatement converti en euros le montant reçu. La défenderesse soutient que la demanderesse n'a pas établi, par pièces, le taux de conversion, en sorte que sa prétention doit être rejetée.
aa) L'article 53 CVIM dispose que l’acheteur s'oblige à payer le prix, dans les conditions prévues au contrat et par la CVIM, et à prendre livraison des marchandises (art. 53 CVIM). En vertu de l'article 59 CVIM, l'acheteur doit payer le prix à la date fixée dans le contrat ou résultant du contrat et de la convention, sans qu'il soit besoin d'aucune demande ou autre formalité de la part du vendeur (art. 59 CVIM). Cette disposition précise clairement que le prix de vente est immédiatement exigible à la date convenue entre les parties ou à celle déterminée en application de l'article 58 CVIM, sans qu'une interpellation ou que la fixation d'un délai supplémentaire ne soit nécessaire (Brunner, op. cit., n. 1 ad art. 59 CVIM; Neumayer/Ming, op. cit, n. 1 ad art. 59 CVIM).
Lorsque l'acheteur ne s'est pas acquitté de son obligation de payer le prix à l'échéance, le vendeur est fondé à demander, en plus des intérêts moratoires (art. 78 CVIM), des dommages-intérêts en application des articles 74 à 77 CVIM (art. 61 al. 1 let. b CVIM; Brunner, op. cit., n. 3 ad art. 59 CVIM; Neumayer/Ming, op. cit, n. 2 ad art. 59 CVIM). Est notamment considéré comme un dommage supplémentaire résultant de la demeure de l'acheteur celui lié à la perte de change et qui survient lorsque le débiteur en retard effectue le paiement dans une monnaie autre que celle ayant cours légal au lieu du domicile du créancier. Il appartient à ce dernier d'apporter la preuve qu'en cas de paiement ponctuel, il aurait immédiatement converti la somme versée dans la devise légale de son domicile ou de son siège social et ainsi évité une dévaluation subséquente de la monnaie de paiement. Cette preuve lui est facilitée, dans la mesure où, s'il fait état d'une perte dé change par rapport à la monnaie qui a cours légal à son domicile ou à son siège social, le juge présume un tel dommage; le débiteur demeure toutefois libre d'apporter la contre-preuve de cette présomption de fait (ATF 123 III 241 consid. 3a; 117 II 256 consid. 2b; 109 II 436 consid. 2; Brunner, op. cit., n. 45 ad art, 74 CVIM; Weber, Vertragsverletzungsfolgen: Schadenersatz, Rückabwicklung, vertragliche Gestaltungsmöglichkeiten, in: Bucher [éd.], Wiener Kaufrecht, 1991, p. 201; cf. ég. Thévenoz, Commentaire romand, 2003, n. 9 ad art; 106 CO; Schranker, Commentaire zurichois, 2000, n. 203 ss ad art. 84 CO).
De nos jours, le taux de conversion des monnaies est un fait notoire, qui ne doit être ni allégué ni prouvé. Il peut, en effet, être contrôlé sur internet, par des publications officielles et dans la presse écrite; il est donc accessible à chacun (arrêt 5A_559/2008 du 21 novembre 2008 consid. 4.1; cf. arrêt 5P.236/1988 du 8 novembre 1988 consid. 1b., in: SJ 1989 p. 205; arrêt 4P.277/1998 du 22 février 1999, consid. 3d, in: RSDIE 2000 p. 575). L'internet permet, en outre, d'accéder rapidement au taux de conversion en vigueur à une date donnée; il n'est donc pas nécessaire d'obtenir une attestation bancaire ou une copie de la presse parue à la date recherchée (arrêt 5A_559/2008 du 21 novembre 2008 consid. 4.1).
bb) La CVIM ne contient aucune régie sur la monnaie et les moyens de paiement légaux. A défaut de dispositions contractuelles spécifiant la devise de paiement, c'est le droit national désigné par les règles de conflit qui la détermine (RVJ 2006 p. 188 consid. 6a; 1999 p. 227 consid. 3c; Neumayer/Ming, op. cit., n. 4 ad art. 34 CVIM). Il convient dès lors de se référer à l'article 118 LDIP (RSDIE 2005 p. 118 s; 2004 p. 106; RVJ 2006 p. 188 consid. 6a; 1999 p. 227 consid. 3c). En vertu de cette disposition, les ventes mobilières sont régies par la convention sur la loi applicable aux ventes à caractère international d'objets mobiliers corporels, concilie à La Haye le 15 juin 1955. Selon l'article 3 al. 1 de ce traité, la vente est, sauf dérogation n'entrant pas en considération dans le cas particulier, régie par la loi interne du pays où le vendeur a sa résidence habituelle au moment où il reçoit la commande.
cc) En l'espèce, toutes les factures de la demanderesse versées en cause sont libellées en euro. A défaut d'allégations des parties à ce sujet, il convient de retenir qu'elles sont convenues de cette monnaie pour le paiement. Du reste, l'application des règles susmentionnées conduit à un résultat identique puisque les commandes ont, avec une vraisemblance confinant à la certitude, été reçues au siège de la demanderesse, à K. C'est dès lors le droit allemand et, partant, l'euro qui constitue la monnaie de paiement.
Au 3 décembre 2001, le cours du franc suisse en euro était de 0.678794 euro (cf. fxtop.com qui donne les taux officiels diffusés par la Banque centrale européenne}. Selon le taux de conversion retenu, le paiement de la défenderesse - 25'750 fr. - correspond à 17’478,96 euros. Le montant dû s'élevait à 17'680,17 euros, en sorte que le dommage subi entre l'exigibilité et le paiement effectif se monte à 201,21 euros, montant que B paiera à A.
c) La demanderesse réclame encore le paiement de sa facture n° 912648 du 2 novembre 2001, d'un montant de 5'808,28 euros. La défenderesse soutient que la marchandise ne lui a pas été livrée.
aa) Les règles relatives à l'obligation de livraison du vendeur et les dérogations que les parties peuvent y apporter ont été exposées au considérant 4a/aa, auquel il convient de se référer.
bb) La CVIM ne contient aucune règle directe quant au fardeau de fa preuve. Le juge saisi ne doit cependant pas se fonder sur sa loi interne, car, de manière indirecte, le traité contribue à la répartition du fardeau de la preuve, cela en raison de la teneur des termes qui y sont employés ou de rétablissement d'une relation entre une règle si son exception. D'une manière générale, celui qui se prévaut d'un droit supporte la charge de la preuve des conditions de son existence; inversement, l'autre partie doit prouver les faite qui excluent la prétention invoquée ou s'y opposent (arrêt non publié 4C.144/2004 du 7 juillet 2004 consid. 3.3; ATF 130 III 258 consid. 5.3; RVJ 2006 p. 188 consid. 5b; Brunner, op. cit., n. 56 s ad art. 4 CVIM; Neumayer/Ming, op. cit. n. 13 ad art. 4 CVIM). La partie qui réclame le paiement de la marchandise vendue doit ainsi établir la livraison conforme au contrat (ATF 130 III 258 consid. 5.3; RVJ 2006 p. 188 consid. 5b).
cc) En l'espèce, les parties n'ont ni allégué ni a fortiori établi le contenu de leur accord au sujet de la livraison litigieuse. Elles n'ont pas versé en cause les documents contractuels s'y rapportant. La marchandise prétendument fournie a fait l'objet de la facture n° 912648 du 2 novembre 2001, laquelle est susceptible d'apporter des précisions sur les obligations réciproques des parties. Il découle en effet de la mention « Incoterms: DDU: Z » y figurant que la demanderesse était tenue de livrer les marchandises commandées à Z au siège de la défenderesse. Pour les motifs déjà exposés, le "bon de livraison" ne constitue pas une preuve appropriée de la délivrance de l'objet de la vente. L'audition, par commission rogatoire, en Allemagne, de l'exploitant de la société de transport, n'a pas non plus permis d'établir que la demanderesse avait exécuté son obligation. Ayant ainsi échoué à apporter la preuve de la livraison des marchandises facturées le 2 novembre 2001, la demanderesse n'est pas fondée à réclamer le paiement de 5'808,28 euros.
L'application des règles de la CVIM au cas d'espèce n'aurait pas conduit à un résultat différent puisque la demanderesse n'a pas établi la livraison des marchandises par leur remise, soit au premier transporteur, soit à l’acheteur (cf. Erdem, op. cit., n° 335).
5. a) L'acheteur en demeure doit un intérêt moratoire dès que le prix de vente est exigible, sans interpellation du vendeur (art. 59 et 78 CVIM; RSDIE 2004 p. 107 et les réf. citées; 2003 p. 103; Brunner, op. cit., n. 4 ad art. 78 CVIM). Les dommages-intérêts dus en vertu de l’article 74 CVIM et notamment ceux liés à la perte de change, sont exigibles dès la survenance du dommage et portent intérêt, conformément à l’article 78 CVIM, à compter de ce moment-là (Brunner, op. cit., n. 48 ad art. 74 CVIM).
L'article 78 CVIM prévoit le paiement d'intérêts de retard sans en préciser le taux (RVJ 2006 p. 188 consid. 6c, 1998 p. 140 consid. 5b; 1995 p. 164 consid. 2c; Brunner, op. cit., n. 7 ad art. 78 CVIM). Celui-ci doit dès lors être déterminé selon le droit désigné par les règles de conflit du for (art. 7 al. 2 CVIM; arrêt 4C.179/1998 du 28 octobre 1998, in: RSDIE 1999 p. 181; RSDIE 2006 p. 202; 2005 p. 120; 2004 p. 108; RVJ 2006 p. 188 consid. 6c). Conformément aux articles 118 LDIP et 3 al. 1 de la convention de La Haye de 1995 sur la loi applicable aux ventes à caractère international d'objets mobiliers corporels (sur l'application de ces dispositions, cf. RSDIE 2005 p. 120; 2004 p. 108; RVJ 1988 p. 140 consid. 5b; 1995 p. 184 consid. 2c), il s'agit à nouveau, de la loi interne du pays où le vendeur a sa résidence habituelle au moment où il reçoit la commande.
b) En l'espèce, l'application de ces règles de conflit désigne le droit allemand. Selon ce droit, le taux de l'intérêt moratoire est supérieur de 5 % au taux de base (§ 288 al. 1 BGB; cf. ég. § 352 ai. 1 HGB). Lorsqu'il s'agst d'une relation juridique à laquelle ne sont pas parties des consommateurs, ce taux est de 8 % supérieur à celui du taux base (§ 288 al. 2 BGB). Ce dernier s'élève à 3,62%. Il est toutefois modifié au 1er janvier et au 1er juin de chaque année; la Deutsche Bank est chargée de publier le taux de base modifié (§ 247 BGB).
La demanderesse a accordé à la défenderesse un délai de 60 jours pour payer les factures du 20 juin 2001; elle a fixé l'échéance pour s'exécuter au 19 août 2001. Le montant de 535 euros porte intérêt dès le lendemain, soit le 20 août 2001. Il ne ressort pas des actes de la cause que les parties sont convenues d'un taux d'intérêt particulier. Sauf disposition contraire de la loi, le juge est lié par leurs conclusions, il peut les réduire mais non les augmenter ni octroyer autre chose par rapport à ce qui est demandé ou moins que ce qui a été reconnu (art. 66 al. 5 CPC; RVJ 1991 p. 323 consid. 3d; Hohl, Procédure civile, Tome II, 2002, n. 3013 ss). Le juge ne peut donc aller au-delà de la demande, en sorte que le montant de 535 euros porte intérêt à 5 % à compter du 20 août 2001. Quant au montant de 201,21 euros, dû en raison de la perte de change, il porte intérêt à 5% à compter du 4 décembre 2001, lendemain de la date de la survenance du dommage.
6. La demanderesse réclamait le montant de 6’598 euros. La défenderesse est astreinte à lui verser 736,21 euros (535 euros + 201,21 euros). Dans ces circonstances, les frais sont répartis à raison de 1/8 à la charge de la défenderesse et à hauteur de 7/8 à la charge de la demanderesse (art. 252 al. 1 CPC).

[...]

Par ces motifs,
PRONONCE
1. B paiera à A le montant de 736,21 euros, avec intérêt à 5% sur 535 euros dès le 20 août 2001 et sur 201,21 euros dès le 4 décembre 2001.
2. Les frais de justice, par 1600 fr., sont mis à la charge de la défenderesse à raison de 1/8 (200 fr.) et de la demanderesse à hauteur de 7/8 (1400 fr.).
3. A paiera à B le montant de 420 fr. à titre de remboursement d'avances et une indemnité de 1995 fr. à titre de dépens. B paiera à A une indemnité de 310 fr. à titre de dépens.}}

Source

Original in French:
- available at University of Basel website, http://www.globalsaleslaw.org/

English translation:
- available at the University of Pace Law School website, http://cisgw3.law.pace.edu}}