Data

Date:
20-01-2006
Country:
Switzerland
Number:
C/27176/2001
Court:
Cour de Justice de Genève
Parties:
--

Keywords

APPLICATION OF CISG - CHOICE OF LAW OF CONTRACTING STATE - CISG APPLICABLE

SCOPE OF CISG – CONTRACT FOR THE SUPPLY OF GOODS TO BE MANUFACTURED OR PRODUCED – COVERED BY CISG (ART. 3(1) CISG)

BURDEN OF PROOF - MATTER GOVERNED BUT NOT EXPRESSLY SETTLED BY CISG (ART. 7(2) CISG) - RECOURSE TO GENERAL PRINCIPLE UNDERLYING CISG - PRINCIPLE THAT A PARTY MUST PROVE THE ASSERTIONS IT MAKES

LACK OF CONFORMITY OF GOODS - TIMELY EXAMINATION AND NOTICE BY BUYER (ARTS. 38 AND 39 CISG)

NON CONFORMITY OF GOODS - REASONABLE EXCUSE FOR NOT GIVING TIMELY NOTICE (ART. 44 CISG) – EXCLUDED

BUYER'S OBLIGATION - PAYMENT OF PRICE (ART. 53 CISG)

SELLER'S RIGHT TO REQUIRE PAYMENT (ART. 62 CISG)

INTEREST - RIGHT TO INTEREST IN CASE OF LATE PAYMENT (ART. 78 CISG) - INTEREST RATE DETERMINED BY DOMESTIC LAW OTHERWISE APPLICABLE

Abstract

An international institute based in Switzerland (buyer) entered into several different contracts with a French printing company (seller) for the creation and printing of visit cards, flyers, and folders. The buyer paid in advance part of the purchase price. Furthermore, on buyer’s request, the goods were delivered in France at the private address of the president of the international institute, while the invoices were sent to the Swiss office of the institute. By mistake the invoices referred to the address of the international institute in Switzerland as the place of delivery. Since the buyer refused to pay the remainder of the purchase price, the seller transferred its credit with the buyer to a Swiss company for the recovery. Consequently, the Swiss company brought an action against the buyer claiming for the credit amount plus interests. The buyer objected that no contract had been concluded between the parties and that it had never received the goods.

The First Instance Court held that the parties had implicitly chosen Swiss law as applicable law, since the buyer had not contested the reference to provisions of Swiss law made by the seller in its pleading.

As to the merits, the Court ruled in favor of the seller as the buyer had not proven the non-delivery of the goods.

The buyer appealed, arguing that the First Instance Court had erroneously reversed the burden of proof since, in its opinion, it was up to the seller to prove the delivery.

The Court of Appeal confirmed the First Instance decision.

As to the applicable law, the Court held that the parties had validly chosen Swiss law as the law governing the dispute and therefore CISG was applicable being part of Swiss law. Moreover, the Court pointed out that contracts for the supply of goods to be manufactured or produced by the seller fall within the scope of CISG unless the buyer supplies a substantial part of the materials (Art. 3(1) CISG). In the case at hand, an international contract for the creation and supply of printing works was governed by CISG.

As to merits, the Court rejected the buyer’s argument on the inversion of the burden of proof. According to the general principles underlying CISG (Art. 7(2) CISG), it was up to the buyer to prove the seller’s non-performance, which it failed to do. On the contrary, the Court found that the seller had demonstrated the delivery of the goods by means of the delivery orders.

In the opinion of the Court, the buyer had also lost its right to rely on lack on conformity of the goods, as it neither gave notice to the seller of the alleged defect according to Art. 39(1) CISG, nor had demonstrated the existence of a reasonable excuse for its failure to give such notice according to art. 44 CISG. Therefore, according to Arts. 53 and 62 CISG, the Court required the buyer to pay the remainder of the purchase price.

Finally, the Court held that the seller was entitled to interest on delayed payment under Art. 78 CISG and that the interest rate had to be calculated in accordance to the applicable domestic (Swiss) law.

Fulltext

EN FAIT

A. L’INSTITUT INTERNATIONAL DE P. ET DE P. (ci-après IIPP) est une association régie par les arts. 60 ss CC, dont le siège est 1, rue (…), à Genève, et qui est présidée par Gisèle RU., domiciliée 1, rue de (…), à Paris (France).

PAC STRA. Sàrl exploite, à son siège social 6-12, rue de (…), à Boulogne-Billancourt (France), une imprimerie spécialisée dans la création, conception et réalisation de dépliants publicitaires.

B. Début 1999, Gisèle RU., agissant en qualité de Présidente d’IIPP, a sollicité de PAC STRA. un devis pour l'élaboration et l’impression de 1000 cartes de visites, 1000 chemises et 1000 dépliants publicitaires pour cette association.

Le 16 février 1999, PAC STRA. a faxé à Gisèle RU. un devis portant notamment sur 1000 exemplaires de cartes de visite et de correspondance pour un prix total de l.580 FF hors taxes. Gisèle a retourné signé pour accord, en précisant que la facture devait être adressée à IIPP à son adresse 1, rue (…), à Genève.

Le 16 mars 1999, PAC STRA. a par ailleurs, sous la plume de Sandrine PAS., gérante, faxé à IIPP, à son adresse genevoise et à l'attention de M. HER., un devis relatif à la création et l'impression de 1000 chemises et de 1000 dépliants publicitaires (journal de 6 pages), en 2 versions, pour un prix total de 48.000 FF hors taxes. Ce devis lui a également été retourné signé "Gisèle RU." pour accord.

C. PAC STRA. a envoyé les épreuves réalisées pour approbation à Gisèle RU. à son adresse à Paris.

Par fax des 30 et 29 mars 1999, Gisèle RU. a signalé à PAC STRA. quelques corrections à apporter aux projets qui lui avaient été soumis et y a donné l'approbation pour l'impression. Par un fax à l'en-tête de l’IIPP, daté du 22 avril 1999, mais émis par un appareil d'une société HYPER VAR. sise à Aubepierre près de Paris, Josiane CA., assistante de la présidente de l’IIPP, a encore envoyé à PAC STRA. le "sommaire" en français et en anglais à insérer dans les dépliants.

Le 2 avril 1999, IIPP a fait parvenir à PAC STRA. un chèque UBS de 10.000 FF, à titre d'acompte; ce chèque, établi à Genève, porte la signature de Gisèle RU.

D. Entre le 23 avril et le 24 juin 1999, PAC STRA. a livré à quatre reprises du matériel imprimé à Gisèle RU. à son adresse à Paris, soit 48 chemises le 23 avril 1999, 6 cartons avec le journal, des chemises avec documentation, des chemises sans documentation, et 12 à 14 paquets environ de documentation le 3 mai 1999, l.600 exemplaires "presentation des lauréats" et l.600 exemplaires "sommaire" version française, le 5 mai 1999, enfin 1.650 chemises “IIPP” “version anglaise" contenues dans 14 paquets le 24 juin 1999.

Les bons de livraison accompagnant ces colis ont été établis au nom de "SCI Mme RU.”. Les trois premiers sont signés, le quatrième portant uniquement une mention manuscrite attestant de la réception. Les deux premières signatures proviennent de la main même de Gisèle RU.

C'est à la demande de Gisèle RU. que PAC STRA. a livré la marchandise au domicile privé de cette dernière.

Toujours à la demande de Gisèle RU PAC STRA. a, le 30 avril 1999, livré par Chronopost 15 kg de marchandise à HYPER VAR. à Aubepierre, à son intention.

E. A l'époque de ces faits, Gìsèle RU. était également à la tête de l'INSTITUT FRANÇAIS POUR LE DEVELOPPEMENT (…) (ci-après: IFDIE), association de droit français qui a son siège au domicile de Gisèle RU., soit 1, rue de (…), à Paris (France).

En octobre et décembre 1998, février et mars 1999, l'IFDIE, sous la plume de sa présidente, a sollicité de PAC STRA. l'établissement d’un devis pour la création et l’impression de chemises et dépliants publicitaires.

Par courriers des 22 octobre et 28 décembre 1998, 26 février et 12 mars 1999, PAC STRA. a envoyé les devis sollicités à IFDIE, à l'attention de Gisèle RU. A la demande de l'IFDIE, ces devis étaient accompagnés d'une quinzaine d'échantillons contenus dans un petit carton.

Aucun des devis adressés à IFDIE n'a toutefois été suivi d'une commande et de livraison de marchandise (tém. CHAM.).

F. Le 30 avril 1999, PAC STRA. a adressé à IIPP, à Genève, deux factures relatives avec les commandes précitées, l'une de 1.580 FF hors taxes et l’autre de 38.173 FF 38 hors taxes, incluant le colis Chronopost envoyé á Aubepierre pour 173 FF. 38, le montant de 10.000 FF versé par chèque étant porté en déduction de la facture totale.

Ces deux factures mentionnent, par erreur, comme adresse de livraison, le siège d’IIPP à Genève.

Ni IIPP, ni sa présidente Gisèle RU., n'ont fait parvenir à PAC STRA. un avis faisant état de défaut, ni ne se sont plaints d'un retard ou d'une absence de livraison de la marchandise commandée.

IIPP n'a pas réglé les factures susmentionnées et n'a pas réagi aux rappels que lui
a envoyés PAC STRA. les 5 juillet, 24 août et 10 septembre 1999.

Par courrier du 21 septembre 1999, IIPP, sous la plume d'Alexandre MA., chargé de coordination, a informé PAC STRA. que les mises en demeure reçues provenaient certainement d'une erreur puisqu’elles concernaient des marchandises qui n'avaient jamais été reçues.

Face au refus d’IIPP d'acquitter les factures qui lui avaient été adressées et après lui avoir fait adressé une première mise en demeure par une socìété française, PAC STRA. a, en août 2000, mandaté la société lausannoise PEM SA aux fins de recouvrer sa créance. A cet effet, elle a cédé à PEM SA sa créance à l'encontre d'IIPP par acte signé le 3 janvier 2001.

A une date qui ne résulte pas du dossier, mais qui est en tous les cas antérieure au 2 janvier 2001, PEM SA, agissant en son nom propre, a fait notifier à IIPP un commandement de payer (poursuite no 00 266420 M) 10.669 fr. 33 avec intérêts à 6% dès le 26 juin 1999, (soit le montant correspond aux factures du 30 avril 1999, majorées de “frais forfaitaires transactionnels” et 1.000 fr. (frais d’intervention).

Opposition totale a été formée à cet acte de poursuite le 10 janvier 2001.

G. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 1er novembre 2001, PEM SA a assigné IIPP en paiement de 9.520 fr. 95 avec intérêts 5% l'an dès le 1er juin 1999, montant correspondant au total des factures demeurées impayées, sollicitant en outre la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer poursuite no 00 266420 M.

IIPP s'est opposé à la demande, faisant valoir que l'existence d'un contrat n'était pas démontrée et qu'elle n'avait jamais reçu la marchandise faisant l'objet des factures, et se réservant le droit de réclamer la restitution du montant de 10.000 FF payé par chèque en avril 1999. IIPP a pour le surplus indiqué ne pas s’opposer à l'application du droit suisse, auquel s'était référée PEM SA dans sa demande, et a contesté la légitimation active de PEM SA, au motif que la cession n’était pas valable, une créance contestée ne pouvant faire l'objet d'une cession.

Par jugement du 7 juin 2002, non frappé d'appel, le Tribunal de première instance a admis la légitimation active de la demanderesse.

Ultérieurement, soit le 27 novembre 2003, IIPP a sollicité la révision du jugement du 7 juin 2002, demande que le Tribunal a rejetée par jugement du 4 mai 2003.

H. Le Tribunal a entendu les parties le 17 avril 2002. A cette occasion, IIPP, représenté par M. BER., son président ad intérim, a confirmé avoir bien commandé en 1999, à PAC STRA., des cartes de visite et du matériel d’imprimerie. Entendu à titre de témoin, Alexandre MA., “chargé de la coordination” de IIPP à Genève en 1999 et 2000, a affirmé avoir été harcelé au sujet d'un paquet qu'il n'avait jamais reçu et n'avoir jamais vu les bons de livraison produits à la procédure; il a précisé qu'il ne s’occupait "pas de Paris" et qu'il ignorait si IIPP avait une adresse en cette ville, à la rue (…).

Le Tribunal a procédé à l'audition de plusieurs autres témoins, dont certains par voie de commission rogatoire. En revanche, IIPP n'a fait ni comparaître, ni auditionner Gisèle RU.

Sandrine PA., gérante de PAC STRA., a déclaré que les contacts entretenus avec Gisèle RU. l'avaient toujours été en France et qu'elle lui écrivait à son adresse privée à Paris. Le volume des commandes d’IIPP représentait 1 à 2 m3 de marchandise, soit 6 cartons pour le journal et les chemises et 3 cartons pour la documentation; le nombre de 12 à 14 cartons figurant sur le bon de livraison du 3 mai 1999 s’expliquait par le fait qu’à titre commercial, un surplus (“la passe") de documents avait été remis à Gisèle RU.

Hocine D., coursier de PAC STRA., lequel ne s'occupait que des livraisons volumineuses, a confirrné avoir effectué au minimum deux livraisons pour IIPP à l’adresse privée de Gisèle RU., consistant en une quantité très importante de marchandise, soit environ 2000 chemises enveloppées gous cellophane, qui ne pouvait dés lors correspondre à des échantillons. En revanche il ne connaissait pas IFDIE.

Les parties ont maintenu leurs positions dans leurs écritures après enquêtes.

J. Par jugement JTPI/6767/2005 rendu le 26 mai 2005 et communiqué par plis du 30 du même mois, le Tribunal a condamné IIPP á verser à PEM SA 9.520 fr. 95 avec intérêts à 5 % l'an dès le 1er juin 1999 et à l’Etat de Genève un émolument complémentaire de décision de 500 fr., avec suite de dépens, comprenant une indemnité de procédure de 1.500 fr.

Après avoir retenu que les parties avaient opté pour l'application du droit suisse, le Tribunal a qualifié les rapports entre les parties de contrat d'entreprise au sens des art. 363 ss. CO et a retenu que les partes avaient convenu que la marchandise devait être livrée au domicile parisien de la présidente d'IIPP, passant ainsi un accord sur le lieu de livraison au sens de l'art. 74 al. 1 CO. PEM SA avait démontré avoir effectué quatre livraisons de marchandises pour IIPP à ladite adresse et la description générale figurant sur les bons de livraison permettait de considérer que le contenu des colis correspondait, à tout le moins de par sa nature, aux commandes effectuées. Les allégués d'IIPP, selon lesquels la marchandise livrée était en réalité destinée à l’IFDIE étaient démentis par le témoin CHAM. IIPP n’avait en outre jamais formulé de réclamations en relation avec un retard ou une erreur de livraison, alors même que la documentation avait été commandée au tout début de l'année et qu'elle avait versé un acompte de 10.000 fr. en avril 1999. De son côté, l’IFDIE ne paraissait pas s'être plainte d'avoir reçu de la marchandise non commandée.

K. IIPP appelle de ce jugement par acte du 30 juin 2005. L'appelant conclut, ce jugement étant mis à néant, au déboutement de l'intimé de toutes ses conclusions, avec suite de dépens pour les deux instances. En substance, il fait grief au Tribunal d'avoir inversé le fardeau de la preuve, le contraignant à prouver un fait négatif, et d'avoir procédé à une mauvaise appréciation des preuves, en admettant la réalité des livraisons alléguées par PEM SA.

PEM SA conclut à la confirmation du jugement entrepris, faisant siens les motifs du jugement attaqué.

EN DROIT

1. L'appel ayant été formé dans le délai et la forme prévus par la loi (art. 291, 296 al. 1 LPC), il est recevable.

Compte tenu de la valeur litigieuse, supérieure à 8.000 fr., le jugement attaqué a été rendu en premier ressort, ce qui ouvre la voie de l'appel ordinaire (art. 22 al. 2 LOJ et 291 LPC). La cognition de la Cour est ainsi complète.

2. Le premier juge a avee raison admis la légitimation active de l'intimée, fondée sur la cession de créance du 3 janvier 2001.

3. La présente cause présente un élément d'extranéité dans la mesure où le litige a trait à un contrat international, conclu entre un fournisseur domicilié en France et un client domicilié en Suisse. Le fait que, par suite d'une cession de la créance à l’intimée, les parties à la présente procédure soient toutes deux domiciliées en Suisse n'enlève rien au caractère international du contrat litigieux, partant du litige, que ce soit sous l'angle du for compétent ou du droit applicable (LORENZ/UNBERATH, Internationale Zuständigkeit und Gläubigerwechsel, in: FS Schlosser, Tübingen, 2005, p. 326).

3.1 La Cour doit dès lors vérifier la compétence locale des tribunaux genevois, qualifier le rapport de droit, et examiner d'office la question du droit applicable (ATF 130 III 417 cons. 2 p. 421; 118 II 83 cons. 2b).

La Convention de Lugano du 16 septembre 1988 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (CL), à laquelle tant la Suisse que la France ont adhéré, est en l'espèce applicable. Les tribunaux genevois sont ainsi compétents ratione loci pour connaître de la demande, en raison du síége en Suisse d'IIPP, partie défenderesse art. 2 al. 2 CL, ATF 129 III 738 cons. 3.2, 131 III 76 consid. 3.4; 130 III 285 consid. 4).

3.2 Le droit applicable et la qualification du rapport juridique entre les parties se détermine en appliquant le droit suisse en tant que lex fori (ATF 111 II 276 cons. 1c).

En l'occurrence, la demande en paiement est fondée sur une commande de travaux d'imprimerie, avec obligation de livraison. Il s'agit ainsi d'une prestation de travail se concrétisant par un résultat déterminé, à savoir d'un contrat d’entreprise au sens des art. 363 et ss CO, ou plus précisément d'un contrat de livraison d’ouvrage (“Werklieferungsvertrag”; CHAIX, Commentaire romand, n. 18 ad art. 363 CO; GAUCH/CARRON, Le contrat d'entreprise, 1999, n. 121 ss).

En l'absence d'une élection de droit, les relations contractuelles nouées entre les parties au contrat sont soumises au droit de l'Etat dans lequel la partie qui doit fournir la prestation caractéristique (ici l'entrepreneur) a son établissement (art. 117 al. 2 LDIP). Ce serait, in casu, le droit français (art. 117 al. 3 let. c LDIP).

Toutefois, l'intimée a en l'espèce fondé ses prétentions sur le droit suisse et l’appelant ne s'y est pas opposé, tout en relevant qu'en principe la qualification juridique du contrat commanderait l'application du droit français. A l’instar du Tribunal, la Cour retient dès lors que les parties ont valablement opté, en cours de procès, pour que le litige soit tranché au regard du droit suisse (ATF 4C.307/2003, cons. 2.2.1).

Le droit suisse englobe les traités multilatéraux portant uniformisation du droit matériel. En fait partie la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur les contrats de vente internationale de marchandises (CVIM), entrée en vigueur, pour la Suisse, le 1er mars 1991, et pour la France, le ler janvier 1988.

A teneur de l'art. 3 al. 1 CVIM, sont réputés ventes les contrats de fourniture de marchandises à fabriquer ou à produire à moins que la partie qui commande celles-ci n'ait à fournir une part essentielle des éléments matériels nécessaires á cette fabrication ou production. La CVIM est ainsi également applicable aux contrats de livraison d'ouvrage qui portent sur la production et la livraison de choses mobilières ou marchandises. (GAUCH/CARRON, op. cit., n. 368; BÜHLER, ZK, 1998, n. 38 Vorbem. ad arts. 363-379 CO; MAGNUS, Wiener UN-Kaufrecht (CISG) in: Staudingers Kommentar zum BGB, Munich, 1993, n. 13 ad art. 3 CVIM; FERRERI, Contrat de vente internationale. Applicabilité et applications de la CVIM, Bâle-Bruxelles, 1999, p. 97 ss; VON CAEMMERER/SCHLECHTRIEM, Kommentar zum Einheitlichen UN-Kaufrecht, Munich, 1995, n. 3 ad art. 3 CVIM).

La CVIM s'applique notamment aux contrats internationaux de réalisation et fourniture de travaux d'imprimerie, telles l'impression, la reliure et la livraison de livres (Belgique, Tribunal de Hasselt, Rechtbank van Koophandel, 8.12.2004, Institute for International Trade Law, Université de Louvain, site www.law.kuleuven.ac.be/ipr/eng/cases/2004; RSDIE 1999 p. 1988 et 2000 p. 111).

4. L’appelant soutient n'avoir reçu aucune livraison de PAC STRA. Se référant à l'art. 8 CC, il considère qu'il appartient à l'intimée d'apporter la preuve de la livraison. Il fait grief au Tribunal d'avoir violé l'art. 8 en lui imposant, en quelque sorte, la preuve d'un fait négatíf, et en retenant que l'intimée, en dépit de la pauvreté des éléments apportés, aurait rapporté la preuve de la livraison alléguée.

L'art. 8 CC n'est pas directement applicable aux matières régies par la CVIM (ATF 130 III 258 cons. 5.3, SJ 2004 p. 505; MAGNUS, op. cit. n. 63 ad art. 4 CVIM; FERRERI, op. cit. n. 49 ad art. 4 CVIM). La CVIM ne contenant toutefois aucune règle expresse sur la répartition du fardeau de la preuve, cette lacune doit être comblée conformément aux principes généraux dont cette convention s'inspire (art. 7 al.2 CVIM). Doit ainsi être appliqué le principe généralement reconnu, selon lequel, dans la règle, il appartient à chaque partie de prouver les éléments de fait nécessaires à l'application de la norme de laquelle elle entend tirer des droits (TF in SJ 2001 p. 304, consid. 5a; MAGNUS, op. cit., n. 67 ad art. 4 CVIM; FERRERI, op. cit. n. 52 ad art. 52 CVIM), principe concrétisé en droit interne suisse par l'art. 8 CC.

En application de ce principe, la partie qui se prévaut d'une règle d’exception doit en principe, prouver les éléments de fait qui rendent l’exception applicable, alors que les éléments de fait attachés à un domaine que l'une des parties connaît significativement mieux que l'autre doivent être prouvés par la partie qui en a la maîtrise (ATF 130 III 258 cons. 5.3; MAGNUS, op. cit., n. 69 ad art. 4 CVIM;
ANTWEILER, Beweislastverteilung im UN-Kaufrecht, thèse Mainz, Berne, 1994, p. 96 ss).

Plus particulièrement encore, il appartient au vendeur qui demande le paiement du prix, de prouver la livraison conforme au contrat (ATF 130 III 258 cons. 5.3), et à l’acheteur de prouver l’existence d'un défaut de conformité et le fait que l'avis de défaut a été donné à temps (art. 39 al. 1 CVIM), s'il entend élever prétentions en raison de la contravention au contrat (ATF 130 III 258 cons. 5.3; Arrêt du Tribunal fédéral 4C.245/2003 cons. 3.1; VENTURI, Commentaire romand, 2003, n. 20 ad chapitre CVIM, art. 201 CO).

La CVIM ne contenant par ailleurs pas de disposition prescrivant au juge la manière dont il doit forger sa conviction, il n'y pas d'obstacle juridique qui empêche l’application en la matière des principes régissant l'appréciation des preuves développés en droit interne suisse (TF in SJ 2001 304, consid. 5a et réf. citées).

6. A l'instar de toute corporation, l'association au sens de l'art. 60 CC est représentée, dans ses rapports avec les tiers, par ses organes (art. 55 al. 1 CC). Dans la mesure où ces organes ont agi en tant que tels (ATF 54 II 142 = JdT 1928 I 514), ceux-ci obligent la personne morale par leurs actes juridiques (manifestations de volonté) et par tous autres faits (art. 55 al. 2 CC; HEINI/PORTMANN, Das Schweizerische Vereinsrecht, SPR V, Bâle, 2005, p. 250 ss).

Est également imputée à la. personne morale le savoir de ses organes (“Wissenszurechnung”; ATF 109 II 341; 104 II 197; RIEMER, Berner Kommentar, 1990, n. 47 ad art. 55 CC; HUGUENIN JACOBS, Basler Kommentar, 1996, n. 19 ad arts. 54/55 CC).

En l'espéce, Giséle RU., présidente d'IIPP, a instruit PAC STRA. de livrer la marchandise commandée à son domicile privé et de facturer la marchandise au siége social d'IIPP à Genève, ainsi qu'il résulte de la mention manuscrite qu’elle a apposée sur la commande de travaux du 16 février 1999 (“A facturer HT Institut International de P. et de P., 1, rue (…) 1202 Genéve, Suisse”). Cette mention laisse clairement entendre que le lieu de facturation et de livraison sont distincts et serait d'ailleurs dépourvue de sens si la livraison devait également être effectuée en Suisse. Cette instruction n'a certes pas été répétée lors de la seconde commande, du 16 mars 1999, mais cela n'était alors pas nécessaire, PAC STRA. l'ayant comprise comme étant une instruction générale.

Comme l'a relevé le Tribunal, cette distinction entre lieu de livraison et lieu de facturation n'est guère surprenante, dans la mesure où Gisèle RU. développait son activité pour IIPP principalement à son domicile parisien, et non pas au siège social genevois de l'appelant.

Ces instructions, émanant de la présidente de l'appelant, dont il n'est pas contesté qu'elle avait qualité pour l'engager, sont opposables à ce dernier.

7. L'appelant soutient en outre qu'aucune lìvraison n'a été effectuée en ses mains.

Sur le sujet, l'intimé a produit quatre bons de livraison, dont deux, soit ceux des 23 avril et 3 mai 1999, portent la signature de Gisèle RU. Le coursier de PAC STRA., Hocine D., entendu en qualité de témoin, a par ailleurs déclaré avoir livré au moins à deux reprises au moins de la marchandise au domicile privée de Gisèle RU. Ces éléments emportent la conviction de la Cour que PAC STRA. a effectué quatre livraisons de marchandises d’imprimerie au domicile parisien de la prèsidente de l'appelant, en date des 23 avril, 3 et 5 mai, et 24 juin 1999.

L’appelant soutient toutefois que la marchandise livrée ne lui était pas destinée, mais était destinée à l’IFDIE.

Certes, les trois premiers bons de livraison mentionnent comme destinataire de la livraison, non pas IIPP, mais la "SCI Gisèle RU.”, ce qui peut prêter à confusion; toutefois, aucun des quatre bons de livraison ne mentionne comme destinataire l’IFDIE. Par ailleurs, le quatrième bon de livraison mentionne, à titre de descriptif de la livraison, "1650 chemises IIPP version anglaise". D'autre part encore, le coursier de PAC STRA. a confirmé avoir en avril/mai 1999, livré à deux reprises au moins de la marchandise à Gisèle RU., à l'intention d’IIPP, alors que l'appellation IFDIE ne lui disait rien. Enfin, le témoin CHAM. a confirmé que l'IFDIE n'avait pas reçu de PAC STRA. autre chose que des échantillons dans un petit carton. A cela s'ajoute que l'appelant, alors même qu'elle avait versé à PAC STRA. un acompte de 10.000 FF, ne s'est jamais plaint d'un retard ou d'une absence de livraison, et ce pendant plusieurs mois et jusqu'après la réception des factures litigieuses et des sommations de payer qui lui ont été adressées les 24 août et 10 septembre 1999, et n'a réagi que le 21 septembre 1999. Enfin, l’intimée n’a pas à se laisser opposer la désorganisation qui a pu régner, à l'époque, au sein de l'appelant, en particulier dans ses relations avec sa présidente domiciliée à Paris.

A l'instar des premiers juges, la Cour a dès lors acquis la conviction que la marchandise livrée au domicile parisien Gisèle RU., endroit désigné par cette dernière, était bien destinée à l’appelant.

L’appelant soutient enfin qu'en tout état, la marchandise livrée ne correspondait pas à celle qui avait été commandée.

En principe, c'est au vendeur qui réclame le prix de vente qu’incombe la preuve d'avoir livré une marchandise conforme à la commande.

En l’espèce, les précisions relatives au descriptif de la livraison figurant sur les quatre bulletins de livraison, sont certes sommaires; elles permettent néanmoins de considérer que le contenu des colis correspondait, à tout le moins de par sa nature, aux commandes de l'appelant.

8. A supposer que la marchandise livrée n'ait pas été entièrement conforme au contrat, cela n'enlèverait in casu rien au bien-fondé de l'action en paiement.

En effet, lorsque le vendeur a effectué la livraison de la marchandise à l'endroit convenu et en a avisé l'acheteur, celle-ci est réputée avoir été reçue de ce dernier.

C'est également le moment où s'opère le transfert des risques (art. 69 al. 2 CVIM; NEUMAYER/MING, Convention. de Vienne sur les contrats de vente internationale de marchandises, Lausanne, 1993, N. 1 ad art. 69 CVIM; ATF 130 III 258 cons 5.3).

Le vendeur doit alors examiner les marchandises ou les faire examiner "dans un délai aussi bref que possible" (art. 38 al. l CVIM; "Untersuchungsfrist”), et il dispose ensuite d’un "délai raisonnable” (“Rügefrist”) pour faire parvenir au vendeur l'avis de non-conformité au contrat (défauts, aliud), sous peine d'être "déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité" (art. 39 al. 1 CVIM; NEUMAYER/MING, op. cit. N. 2 ad art. 39 CVIM).

Par ailleurs, l'acheteur qui entend faire valoir un défaut doit en indiquer la nature au vendeur: il importe que l’avis reproduise exactement le résultat de son examen; une remarque générale comme “la marchandise est défectueuse" ne suffit pas (NEUMAYER/MING, op. cit. n. 5 ad art. 39 CVIM).

Le "délai raisonnable" énoncé à l'art. 39 al. 1 CVIM pour donner l’avis des défauts ne devrait pas dépasser, en moyenne, un mois à compter de la date de la réception (BGH 8.3.1995 in: BGHZ vol. 129, p. 75, 85; OGH Wien 15.10.1998 in: ZfRV 1999, p. 63; OLG München, 11.3.1998 in: SZIER/RSDIE 1999 p. 199; CA Grenoble 13.9.1995 in: DALLOZ, 1996, p. 947; OG LU 8.1.1997 in: SZIER/RSDIE, 1997 p. 132; V. CAEMMERER/SCHLECRTRIEM, Kommentar zum Einheitlichen UN-Kaufrecht, München, 1995, N. 17 ad art. 39 CVIM; ACHILLES, Kommentar zum UN-Kaufrechtsübereinkommen, Neuwied, 1999, n. 11 ad art. 39 CVIM; HEUZÉ, La vente internationale de marchandises, Paris, LGDJ, 2000, p. 271; MAGNUS in: Honsell, éd., Kommentar zum UN-Kaufrecht, Berlin-Zurich, 1996, n. 22 ad art. 39 CVIM).

Passé ce délai, la marchandise est tenue pour acceptée et l'acheteur ne peut plus se prévaloir de l’inexécution ou mauvaise execution du contrat (THIEFFRY, “La prise en considération du comportement des parties par la Convention de Vienne" in: Mélanges Neumayer, Bâle, 1997, p. 287; V. CAEMMERER/SCHLECHTRIEM, op. cit., n. 30 ad art. 39 CVIM).

La preuve de l'existence des défauts, le fait de les avoir signalés au vendeur, et de les avoir signalés à temps, incombe à l’acheteur (ATF 130 III 358, cons. 5.3 = SJ 2004 p. 503; V. CAEMMERER/SCHLECHTRIEM, op.. cit., n. 37 ad art. 39 CVIM; Venturi, op. cit., n. 20 ad chapitre CVIM sous art. 201 CO).

En l'espèce, l'appelant, ne justifie pas avoir donné un avis de non-conformité (défauts, aliud, livraison incomplète) à PAC STRA., ni l'avoir donné dans un délai raisonnable d'un mois à compter de la dernière livraison. Il n'allègue ni ne démontre l'existence d'une “excuse raisonnable" au sens de l'art. 44 CVIM pour justifier sa défaillance.

Partant, il est réputé avoir reçu, à l'endroit indiqué, une marchandise conforme au contrat.

9. A teneur de l'art. 53 CVIM, l'acheteur s'oblige (…) à payer le prix et à prendre livraison des marchandises. Quant à l'art. 61 al. 1 let. a CVIM, il prescrit que si l’acheteur n'a pas exécuté une quelconque des obligations résultant pour lui du contrat de vente ou de la CVIM, le vendeur est fondé à exercer les droits prévus aux arts. 62 à 65.. D’après l'art. 62 CVIM, le vendeur peut exiger de l'acheteur le paiement du prix, la prise de livraison des marchandises ou l'exécution des autres obligations de l’acheteur, à moins qu'il ne se soit pas prévalu d'un moyen incompatible avec ces exigences (TF 4C.307/2003, cons. 3.2.2).

L'art. 78 CVIM prévoit l’octroi d'intérêts moratoires, mais ne précise pas le taux applicable, ni le dies a quo. En cas de contestation, la question est régie par le droit désigné parles règles de conflit de lois de l'Etat du for (RSDIE 2005 p. 120-121).

En l'espèce, l'ìntimée s’est référée au droit suisse (art. 104 al. 1 CO) et a réclamé un intérêt moratoire 5% à compter du 1er juin 1999. Ce point n'a pas fait l'objet d'une controverse, et le Tribunal était dès fondé d’y donner suite.

L’appelant, qui n’a réglé aucune des factures de son fournisseur, est débiteur envers l'intimée, cessionnaire de ce dernier, du prix de vente réclamé, avec intérêts moratoires 5% l'an dès le 1er juin 1999.

C'est donc à bon droit que le Tribunal, a condamné l'appelant à verser à l’intimée les montants afférents aux deux factures du 30 avril 1999, soit de 39.580 FF., à l’exclusion (ce point n’étant plus contesté en appel) de 173 FF 38 relatifs au Chronopost à Aubepierre.

Le taux de conversion de ce montant en francs suisses appliqué par le Tribunal n'a pas fait l'objet de contestation devant la Cour et sera confirmé.

La condamnation de l'appelant à verser à l'intimée 9.520 fr. 95, avec intérêts moratoires 5% l’an à compter du 1er juin 1999 sera dès lors confirmée.

Les autres points du dispositif du jugement entrepris n'ont fait l'objet d'aucune discussion en appel et seront également confirmés.

10. L'appelant, qui succombe entièrement, sera condamné aux dépens l'appel, dans lesquels sera comprise une indemnité de procédure de l.500 fr. à titre de participation aux honoraires d'avocat de l'intimée (art. 176 al. 1 LPC).

PAR CES MOTIFS

LA COUR:

A la forme:

Déclare recevable l'appel interjeté par l’INSTITUT INTERNATIONAL DE P. ET DE P. contre le jugement JTPI/6767/2005 rendu le 26 mai 2005 par le Tribunal de première instance dans la cause C/27176/2001-7.

Au fond:

Confirme ce jugement.

Condamne l'INSTITUT INTERNATIONAL DE P. ET DE P. aux dépens d'appel lesquels comprennent une indemnité de procédure de 1.500 fr. qui
constitue une participation aux honoraires d'avocat de PEM SA.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.}}

Source

Original in French:
- available at the University of Basel website, http://www.cisg-online.ch

Also published in:
- 103 Schweizerische Juristen-Zeitung, n. 14/2007, pp. 353-356}}