Data

Date:
25-02-2005
Country:
France
Number:
03/21335
Court:
Cour d'Appel de Paris
Parties:
--

Keywords

LACK OF CONFORMITY - TIMELY NOTICE OF LACK OF CONFORMITY - CONTRACTUAL AGREEMENT FOR DIFFERENT PERIOD OF GUARANTEE (ART. 39(2)CISG)

SELLER’S KNOWLEDGE OF LACK OF CONFORMITY (ART. 40 CISG) – BURDEN OF PROOF ON THE BUYER

Abstract

A US seller (Appellant) and a French buyer (Respondent) entered into a contract for the sale and delivery of computer motherboards between May 1996 and December 1997. The contract provided for a seller's liability exoneration clause as well as a one year guarantee for the goods. The seller developed three prototypes of the motherboards, but only the first and the third one were commercialized. When the buyer placed an order with the seller in April 1997, the third generation of motherboards was already on the market but the buyer continued to purchase the first generation motherboards. Some of the items ordered in May 1996 and April 1997 turned out to be defective, as they were not compatible with the electricity voltage. The buyer gave notice to the seller of the alleged defects only in October 1998 and subsequently filed suit against the seller for damages. The Court of first instance allowed expert opinion on the matter, stressing the fact that the computer motherboards had to meet requirements of which the seller never informed the buyer. The Court ruled in favour of the buyer. The seller appealed the decision.

First, the Court of Appeal in Paris held that the contract was governed by CISG (Art. 1(1)(a)).

The Court also recognized that the seller’s liability exoneration clause and the one year guarantee for the goods provided for in the contract were valid under CISG (Art. 39(2) CISG). The Court rejected the buyer's argument that the seller, having knowledge of the defects (Art. 40 CISG), was not entitled to rely on Arts. 38 and 39 CISG despite the buyer's failure to give notice of the defective goods within one year. In the opinion of the Court, Art. 40 CISG does indeed restrict a seller’s right to limiting its liability where the alleged lack of conformity of the goods, as defined in Articles 35 and 36 of CISG, is grounded in facts known to the seller or facts which the seller could not have ignored and which were not revealed to the buyer at the time of the conclusion of the contract. However, as CISG does not impose on the seller any presumption of knowledge of lack of conformity, the burden falls on the buyer to prove that the seller had precise knowledge of the buyer’s intended use of the goods. Therefore, it was incumbent upon the buyer to seek information and counsel from the seller with respect to the motherboards' technical requirements. Having failed to do so, the seller was exonerated of all liability. Accordingly, the Court overturned the decision of the court of first instance and ordered the buyer to pay the contract price and costs.

Fulltext

(...)

APPELANTE au principal
INTIMEE incidemment

Société S...
prise en la personne de ses représentants légaux
(...) SAN JOSE - ETATS-UNIS
représentée par la SCP B... - G..., avoués à la Cour assistée de Me L..., avocat au barreau de PARIS, toque : (...), et de Me D... C..., avocat au barreau de PARIS, toque : (...)

INTIMEE au principal
APPELANTE incidemment

S.A. DIG...
prise en la personne de ses représentants légaux
(...) BAGNOLET
représentée par la SCP B... - C... - C..., avoués à la Cour assistée de Me G..., avocat au barreau de PARIS, toque : (...)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 novembre 2004, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur JACOMET, président
Madame COLLOT, conseiller
Madame BLUM, conseiller appelée d'une autre chambre pour compléter la Cour qui en ont délibéré.
Greffière, lors des débats : Madame MARTEYN

ARRET:

- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par Monsieur JACOMET, président
- signé par Monsieur JACOMET, président et par Madame MARTEYN, greffière présente lors du prononcé.

La cour est saisie de l'appel, déclaré le 16.10.2003, d'un jugement rendu, le 11.09.2003.

L'objet du litige porte essentiellement sur la demande de la SA DIG..., dont l'activité consiste à procéder à l'intégration de configurations informatiques, dirigée contre la société de droit américain S..., en réparation du préjudice résultant de la livraison de cartes mères qui s'étaient révélées défectueuses et que lui avait vendues cette dernière société.

Le tribunal a statué, ainsi qu'il suit :

- dit qu'il n'y a lieu à extension de la mission de l'expert,
- homologue le rapport déposé le 15 octobre 2001, augmenté du rapport complémentaire au rapport final d'expertise déposé le 31 décembre 2001,
- reçoit DIG... en sa demande principale, la dit partiellement fondée, y fait partiellement droit,
- condamne S... à payer à DIG... la somme de 862.491 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 janvier 1999,
- condamne S... à rembourser à DIG... les frais d'expertise,
- déboute les parties de toutes leurs autres demandes contraires au présent jugement,
- ordonne l'exécution provisoire, sans constitution de garantie,
- condamne S... à payer à DIG... la somme de 30.000 € au titre de l'article 700 du NCPC,
- condamne S... aux dépens.

Au soutien de sa décision, le tribunal a, notamment retenu que :

il n'y avait lieu à ordonner un complément d'expertise, déjà rejeté par la cour par un arrêt du 27.06.2001, statuant en référé, la société S... tentant par cette demande de pallier ses manquements initiaux lors des réunions d'expertises dont elle n'avait pas pris conscience de l'importance ; il convenait d'homologuer le rapport d'expertise déposé le 15.10.2001 augmenté du rapport final du 31.12.2001, S... a reconnu dès octobre et novembre 1998 avoir eu connaissance du problème,

L'expert à indiqué dans son rapport :

Le vrai problème ( - - - ) est inhérent à la construction même de la carte S... qui fit passer les courants nécessaires à son fonctionnement par un seul et même connecteur, provoquant de ce fait une consommation trop forte sur un point de passage obligé,
S... n'a pas informé des limites de ses cartes et il en est résulté les dysfonctionnements constatés,
En l'état et malgré les propositions de S..., il n'existe pas d'autre solution pratique et concevable que de changer la carte mère, les 414 cartes d'origine n'étant pas pourvues des dispositifs qui auraient permis d'éviter la surchauffe constatée,
Les difficultés occasionnées à DIG... du fait des cartes mères défectueuses ont été, et sont très importantes (---), à la suite de la survenance des pannes de ces serveurs, plusieurs sociétés ont préféré ne pas poursuivre leur collaboration avec DIG... et s'adresser à un autre fournisseur,
Le préjudice peut être évalué aux montants suivants :
Perte de clientèle : entre 21.757.750 et 30.757.750 FF HT,
Désorganisation interne : 7.146.400 FF HT,
Interventions techniques : entre 1.214.504 et 1.278.904 FF HT,

En ce qui concerne la perte de clientèle actuelle et à venir comme pour les pertes estimées de chiffre d'affaires, et compte tenu que le nombre indiqué de cartes défectueuses est de 49 sur 440 il y a lieu de retenir un pourcentage de dédommagement de 12 % soit les montants de 457.347 EURO (perte de clientèle actuelle), 91.470 EURO (perte de clientèle à venir) 128.057 EURO (désorganisation interne), tandis que les coûts effectifs (22.318 EURO) et ceux des interventions techniques (182.939 EURO ) seront admis pour 100 %, en sorte que le préjudice s'élève au montant de 862.491 EURO, avec intérêt au taux légal à compter de la première assignation du 12.01.1999,
La SA DIG... n'a pas justifié d'un préjudice distinct du retard à recevoir le paiement ;

Dans le dernier état de la procédure :

La société S..., appelante au principal, intimée incidemment a, par conclusions du 27.10.2004, demandé :
- recevoir S... en son appel et la déclarer bien fondée en ses demandes,
- au préalable : ordonner le rejet des débats des pièces communiquées par la société DIG... sous le n° 38 et 57 intitulés "le rapport de LCA revu à la lumière des observations de l'expert judiciaire",
- constater que le jugement n'est pas fondé en droit, qu'il contient des erreurs de fait et de calcul, des contradictions et qu'il ne répond pas aux demandes de S...,
- en conséquence, reformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau, A titre principal,
- constater l'application de la convention de Vienne du 11 avril 1980 aux relations contractuelles entre les parties,
- constater l'application de la clause de garantie contractuelle d'un an au litige,
- constater l'expiration du délai de garantie des cartes mères à l'origine du litige,
- dire et juger que la demande de DIG... est forclose,
- déclarer les demandes de DIG... irrecevables,
- constater l'application de la clause exonératoire de responsabilité contenue dans les documents contractuels,
- dire et juger que S... n'engage pas sa responsabilité contractuelle à l'égard de DIG... en application de la clause exonératoire de responsabilité,
- débouter DIG... de toutes ses demandes, fins et prétentions,

A titre subsidiaire,

- déclarer que S... n'a commis aucune faute à l'égard de DIG... tant au titre du défaut de conformité des produits livrés que du défaut de conseil allégué,
- constater que les cartes mères livrées par S... n'étaient pas défectueuses,
- constater que les limites de tolérance des cartes mères n'ont jamais été atteintes par les configurations mises en place par DIG... et qu'en conséquence un conseil sur cette question était inopérant et inutile,
- dire et juger en tout état de cause que S... n'était tenu d'aucune obligation de conseil sur les tolérances des cartes mères à l'égard de DIG...,
- constater que DIG... ne démontre avoir subi aucun préjudice réel, certain et direct, que sa demande d'indemnisation est forfaitaire et qu'elle n'est fondée que sur des pertes estimées jamais réalisées à ce jour,

En conséquence,
- dire et juger que S... n'engage pas sa responsabilité,
- débouter DIG... de toutes ses demandes, fins et prétentions,

A titre infiniment subsidiaire,

- ordonner la désignation d'un expert judiciaire avec pour mission de :
° déterminer la cause des brûlures constatées sur les connecteurs d'alimentation des 21 ou 144 cartes mères S... à l'origine du présent litige,
° se faire communiquer : les 21 ou 144 cartes mères litigieuses, l'origine, la date de retour et les causes de retour des 21 ou 144 cartes mères litigieuses, les principes et les normes d'assemblage utilisés lors de la mise en place des configurations de DIG..., les 21 ou 144 connecteurs femelles qui équipaient les 21 ou 144 cartes mères au moment de la consumation des connecteurs, la preuve d'achat et la date de livraison de chacun des connecteurs femelles ainsi que la preuve qu'ils étaient adaptés aux 21 ou 144 cartes mères litigieuses, les prospectus et documentations des constructeurs des connecteurs femelles, examiner chacun des connecteurs femelles équipant ces connecteurs et déterminer leur marque, leur nature et leur capacité, déterminer la qualité du contact offert aux plots du connecteur d'alimentation mâle équipant la carte mère S..., déterminer l'existence d'éventuelles traces d'oxydation, d'une façon générale conduire tous tests permettant de reproduire les conditions techniques ayant conduit aux désordres constatés afin d'être à même de déterminer très exactement la cause ayant conduit à la détérioration du connecteur d'alimentation équipant les cartes mères,

En tout état de cause,

- condamner DIG... à payer à S... la somme de 100.000 € au titre de l'article 700 du NCPC,
- condamner DIG... aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La S.A. DIG..., intimée au principal, appelante incidemment, a, par conclusions du 29.10.2004, demandé :

- constater que la société appelante a failli à une obligation contractuelle de son devoir élémentaire, essentiel, de conseil, inscrit dans les articles 1604 et 1615 du Code civil, en n'informant point son acheteur du risque né d'un débit trop intense du courant électrique sur les cartes livrées avec un seul connecteur, risque pouvant être pallié par une indication éclairée, justement non fournie, ladite obligation d'essence contractuelle n'étant soumise à aucune prescription sinon la prescription trentenaire,
- constater que, dans les mêmes conditions la société S... n'a pas effectué de délivrance conforme d'une carte avec deux connecteurs,
- confirmer conséquemment la décision déférée en ce qu'elle a retenu la responsabilité pleine et entière de la société S..., à la fois, en raison de la violation du devoir de conseil pour les cartes livrées ne comportant qu'un seul connecteur, et en raison de l'inexécution d'une délivrance conforme des cartes mères corrigées comportant deux connecteurs, l'action introduite sur l'un ou l'autre de ces fondements échappant à toute prescription à la fois en application de l'article 40 de la Convention de Vienne et pour être l'une virtuellement introduite dans l'autre,
- dire et juger qu'il doit en être d'autant plus ainsi, qu'il s'est avéré que S... a connu cette difficulté, bien avant que ne surviennent les graves incidents, à une date à laquelle elle aurait pu interdire le trouble grave à venir, et y a remédié dans ses rapports avec des tiers, et non avec la société DIG..., à laquelle après aveu exprès et littéral de sa faute, elle a proposé des solutions ridicules, et impossibles à mettre en oeuvre, comme l'expert l'a indiqué,
- dire et juger la Convention de Vienne malicieusement tronquée par la société S..., totalement étrangère à la violation du devoir de conseil et d'assistance et alors que, sous la plume de S..., est celé l'article 40 de cette même convention, qui interdit à S... son argumentation quant à la prétendue tardiveté de l'action,
- dire et juger conséquemment que ne saurait être davantage retenu le délai de la garantie que S..., au mépris de la procédure pendante en France, à laquelle elle participait, avait tenté de faire valoir aux USA, recevant, lors, l'enseignement mérité ;
- dire et juger, de surcroît, quant à la non délivrance conforme des cartes que toute limite à la garantie est exclue, provenue du professionnel qu'est S..., et que toute clause limitative de responsabilité, laquelle ne fait pas référence à S..., fléchit devant l'absence de la précision élémentaire, la double connexion, du conseil élémentaire qui aurait dû être fourni et se heurte à l'article 40 de la convention de Vienne, c'est-à-dire la faute lourde sinon dolosive de la société venderesse,
- dire et juger que cette limite alléguée se heurte encore à la disposition de l'article 36 de la Convention de Vienne selon laquelle "le vendeur est responsable, conformément à la présente convention, de tout défaut de conformité qui existe au moment du transfert des risques à l'acheteur, même si ce défaut n 'apparaît qu'ultérieurement" ;
- dire et juger, au surplus, et pour faire reste de droit à S... que l'expertise s'est déroulée de façon exemplaire, l'expert demeurant constant dans ses explications, jusque et y compris, dans son rapport complémentaire, lesquelles explications ne sont nullement hypothétiques, et concordent à la virgule près, avec l'aveu de S..., qu'il s'agisse de celui exprimé à l'orée du débat judiciaire ou de celui qui apparaît des démarches faites après coup, telle, par exemple, celle insérée dans la nécessité avouée de voir modifier l'arrivée du courant électrique ;
- constater qu'utilisant les pires procédés, ainsi en fût-il de l'introduction de sa procédure aux USA, la société S... a réussi à faire traîner la présente procédure sur des années aggravant encore l'énorme préjudice de la société DIG...,
- dire et juger le préjudice de DIG..., tel qu'exprimé ci-après, directement lié à la brûlure des cartes mères en raison du coup ainsi porté à l'assembleur vendeur des configurations informatiques haut de gamme mises hors d'usage ;
Et statuant sur l'étendue du préjudice subi par la société DIG..., sanctionnant l'attitude abusive et malicieuse de la société S...,
- constater qu'hélas, et depuis la fin des opérations d'expertise, le nombre de cartes immobilisées et passé de 31 à 144,
- dire et juger que le préjudice de la société DIG... s'appréciera à partir de l'impossibilité de répondre à de nouvelles demandes, de la perte d'une clientèle importante l'un de ces clients, n'hésitant pas à flétrir les méthodes de vente de la concluante, lors cependant que celle-ci demeurait victime de la faute de la seule responsable,
- dire et juger en réactualisant le préjudice à partir de nouvelles données, et à supposer qu'il faille le pondérer, en tenant compte tout à la fois de la perte de clientèle, de la désorganisation interne entraînant lourde dépense, des nécessaires interventions techniques, qu'est due à la société DIG... la somme de 2.032.815 € montant des causes sus-énoncées, à quoi s'ajoute le montant du préjudice né des manoeuvres abusives et malicieuses de S..., avant et pendant le procès, à partir desquelles DIG... perd sa place - c'était le choix de S... - sur le marché français, ledit préjudice spécifique non inférieur à 2.000.000 € ;
- condamner S... au paiement de la somme totale précitée de 4.032.815 €, outre les intérêts de droit à compter du jour de l'assignation, ces mêmes intérêts alloués au besoin à titre de dommages-intérêts supplémentaires, les dits intérêts calculés après application de l'article 1154 du Code civil,
- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'expertise.

La SARL DIGITECHNIC a, à nouveau conclu le 02.11.2004 , en demandant :

- constater que la société appelante a failli à une obligation contractuelle de son devoir élémentaire, essentiel, de conseil, inscrit dans les articles 1604 et 1615 du Code civil, en n'informant point son acheteur du risque né d'un débit trop intense du courant électrique sur les cartes livrées ne comportant qu'un seul connecteur, risque pouvant être pallié par une indication éclairée, justement non fournie, ladite obligation d'essence contractuelle n'étant soumis à aucune prescription sinon la prescription trentenaire,
- constater que, dans les mêmes conditions la société S... n'a pas effectué de délivrance conforme d'une carte avec deux connecteurs,
- confirmer conséquemment la décision déférée en ce qu'elle a retenu la responsabilité pleine et entière de la société S..., à la fois en raison de la violation du devoir de conseil pour les cartes livrées rie comportant qu'un seul connecteur, et en raison de l'inexécution d'une délivrance conforme des cartes mères corrigées comportant deux connecteurs, l'action introduite sur l'un ou l'autre de ces fondements échappant à toute prescription à la fois en application de l'article 40 de la Convention de Vienne et pour être l'une virtuellement introduite dans l'autre,
- dire et juger qu'il doit en être d'autant plus ainsi, qu'il s'est avéré que S... a connu cette difficulté, bien avant que ne surviennent les graves incidents, à une date à laquelle elle aurait pu interdire le trouble grave à venir, et y a remédié dans ses rapports avec des tiers, et non avec la société DIG..., à laquelle après aveu exprès et littéral de sa faute, elle a proposé des solutions ridicules, et impossibles à mettre en oeuvre, comme l'expert l'a indiqué,
- dire et juger la Convention de Vienne malicieusement tronquée par la société S..., totalement étrangère à la violation du devoir de conseil et d'assistance et alors que, sous la plume de S..., est celé l'article 40 de cette même convention qui interdit à S... son argumentation quant à la prétendue tardiveté de l'action,
- dire et juger conséquemment que ne saurait être davantage retenu le délai de la garantie que S..., au mépris de la procédure pendante en France, à laquelle elle participait, avait tenté de faire valoir aux USA, recevant, lors, l'enseignement mérité ;
- dire et juger, de surcroît, quant à l'inexécution d'une délivrance conforme des cartes que toute limite à la garantie est exclue, provenue du professionnel qu'est S..., et que toute clause limitative de responsabilité fléchit devant l'absence de la précision élémentaire, la nécessité de la double connexion, soit le conseil élémentaire qui aurait dû être fourni,
- dire et juger que cette même limite de responsabilité se heurte à l'article 40 de la convention de Vienne, c'est-à-dire la faute lourde sinon dolosive de la société venderesse,
- dire et juger que cette limite alléguée se heurte encore à la disposition de l'article 36 de la Convention de Vienne selon laquelle "le vendeur est responsable, conformément à la présente convention, de tout défaut de conformité qui existe au moment du transfert des risques à l'acheteur, même si ce défaut n 'apparaît qu'ultérieurement" ;
- dire et juger, au surplus, et pour faire reste de droit à S... que l'expertise s'est déroulée de façon exemplaire, l'expert demeurant constant dans ses explications, jusque et y compris, dans son rapport complémentaire, lesquelles explications ne sont nullement hypothétiques, et concordent à la virgule près, avec l'aveu de S..., qu'il s'agisse de celui exprimé à l'orée du débat judiciaire ou de celui qui apparaît des démarches faites après coup, telle, par exemple, celle insérée dans la nécessité avouée de voir modifier l'arrivée du courant électrique ;
- constater qu'utilisant les pires procédés, ainsi en fut-il de l'introduction de sa procédure aux USA, la société S... a réussi à faire traîner la présente procédure sur des années aggravant encore l'énorme préjudice de la société DIG...,
- dire et juger le préjudice de DIG... tel qu'exprimé ci-après, directement lié à la brûlure des cartes mères en raison du coup ainsi porté à l'assembleur vendeur des configurations informatiques haut de gamme mises hors d'usage ;

Et statuant sur l'étendue du préjudice subi par la société DIG..., sanctionnant l'attitude abusive et malicieuse de la société S...,
- constater qu'hélas, et depuis la fin des opérations d'expertise, le nombre de cartes immobilisées et passé de 31 à 144,
- dire et juger que le préjudice de la société DIG... s'appréciera à partir de l'impossibilité de répondre à de nouvelles demandes, de la perte d'une clientèle importante l'un de ces clients, n'hésitant pas à flétrir les méthodes de vente de la concluante, lors cependant que celle-ci demeurait victime de la faute de la seule responsable,
- dire et juger en réactualisant le préjudice à partir de nouvelles données, et à supposer qu'il faille le pondérer, en tenant compte tout à la fois de la perte de clientèle, de la désorganisation interne entraînant lourde dépense, des nécessaires interventions techniques, qu'est due à la société DIG... la somme de 2.032.815 € montant des causes sus-énoncées, à quoi s'ajoute le montant du préjudice né des manoeuvres abusives et malicieuses de S..., avant et pendant le procès, à partir desquelles DIG... perd sa place - c'était le choix de S... - sur le marché français, ledit préjudice spécifique non inférieur à 2.000.000 € ;
- condamner S... au paiement de la somme totale précitée de 4.032.815 €, outre les intérêts de droit à compter du jour de l'assignation, ces mêmes intérêts alloués au besoin à titre de dommages-intérêts supplémentaires, les dits intérêts calculés après application de l'article 1154 du Code civil,
- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'expertise.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 03.11.2004 ,

Par conclusions du 04.11.2004 la société S... a sollicité que soient rejetées des débats ces dernières écritures tandis que, le même jour, la SA DIG... a conclu à leur recevabilité.

La cour, en ce qui concerne, les faits, la procédure, les moyens et prétentions des parties, se réfère au jugement et aux conclusions d'appel.

SUR CE

Considérant que les écritures du 02.11.2004 prises par la SA DIG... ne peuvent qu'être écartées des débats, dès lors, d'une part, que les parties doivent échanger leurs écritures avant la clôture dans des conditions telles qu'elles puissent être avant cette clôture, loyalement discutées, d'autre part, que tel n'est pas le cas de conclusions prises, la veille de la clôture effective, non paginées modifiant celles prises quelques jours avant par la même partie, en y ajoutant une vingtaine de paragraphes dans les motifs ;
Considérant qu' il n'y a pas lieu pour autant de rejeter des débats les conclusions signifiées par la société S..., les 08.10 et 27.10.2004, dès lors, d'une part, que, pour celles du 08.10.2004, elles ont été prises largement avant la clôture effective mais aussi avant la date alors prévue pour cette clôture qui était le 21.10.2004, d'autre part, que pour les secondes, la clôture alors fixée au 28.10.2004, a été reportée au 03.11.2004 tandis que la SARL DIG... a pu y répliquer ;
Considérant que la société S... sollicite que soient écartées des débats, les pièces 38 et 57 communiquées par la S.A. DIG... qui se présentent comme un document établi par Monsieur L..., le 12.05.2003 sur document de LCA mais qui en réalité est un montage du rapport de ce dernier dans lequel sont intégrés des extraits du rapport d'expertise judiciaire, Monsieur D..., ces extraits s'étant accompagnés dans la seconde de ces pièces de la mention "intégré par DIG..." ;
Considérant que nonobstant le risque de méprise que comportait une telle pratique, qui ne s'est pas en définitive réalisée, il n'y a lieu d'écarter ces pièces, eu égard à la mention figurant sur la première page de cette pièce, de nature à éviter une telle méprise, en raison de l'avertissement clair et précis qu'elle comportait ici intégralement reproduite : "le rapport de LCA revu à la lumière des observations de l'expert judiciaire
Les observations issues du rapport de Monsieur D..., expert judiciaire, ont
été intégrées par DIG... dans ce document de LCA produit par S... intitulé : note de synthèse sur l'expertise réalisée par Monsieur D... et la nécessité d'ordonner des opérations d'expertises complémentaires dans le cadre du litige qui oppose les sociétés DIG... et S... ;
NB : le document original de LCA a été scanné et découpé pour permettre l'insertion des observations issues du rapport de l'expert judiciaire .
Le texte du document d'origine n'a subi aucune modification" ;
Considérant que, pour critiquer le jugement sur les condamnations prononcées contre elle, la société S... prétend en substance que la demande serait irrecevable en faisant valoir que :
Elle est justifiée à soulever en tout état de cause, la fin de non recevoir, tirée de l'expiration de la garantie du vendeur, limitée en l'espèce à un an,
Le litige est soumis à la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandise, qui prévoit, par application de l'article 39 - 2 de cette convention, une garantie de deux ans, délai, que les parties sont libres d'aménager et de réduire conventionnellement et au delà duquel l'action contre le vendeur est forclose,
La réduction de cette garantie au délai d'un an qui figurait sur les commandes était connue et acceptée par la S.A. DIG..., tandis que ce délai était expiré pour les commandes litigieuses étant précisé que les ventes se sont étalées entre le 21.05.1996 et le 22.04.1997 à l'exception de 10 cartes mères vendues le 01.12.1997 dont les connecteurs n'ont pas brûlé, que les réclamations ont été formulées à partir d'octobre 1998 tandis que l'assignation en référé a été délivrée en janvier 1998,
Pour éviter cette fin de non recevoir la S.A. DIG... ne peut utilement changer le fondement juridique de sa demande, après que la forclusion ait été acquise ,
À supposer que les dispositions de l'article 1615 du code civil s'appliquent, ce qui n'est pas le cas, s'agissant du droit international de la vente, l'obligation de conseil liée à celle de délivrance prévue par les articles 1604 et suivants du code civil, s'inscrirait dans la limite contractuelle de la garantie en droit français,
Pas plus la S.A. DIG... ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 40 de la Convention de Vienne, écartant l'application de la limitation de la garantie, lorsque le vendeur avait connaissance des faits avant la vente, puisqu'il ressort des déclarations de S..., que la première version a été commercialisée le 30.04.1996, que la seconde version ne l'a pas été, que les premiers exemplaires de la troisième version ont été produits le 18.11.1990, à la suite de demande de la clientèle et compte tenu du faible coût lié à l'installation d'un connecteur supplémentaire, en sorte que cette dernière version est largement postérieure à la dernière commande du 22.04.1997 ;

Considérant que la S.A. DIG... réplique en substance que :

S... ne peut utilement invoquer les dispositions des articles 38 et 39 de la convention de VIENNE en faisant abstraction de celles de l'article 40 de cette même convention qui en excluent l'application, lorsque le défaut de conformité porte sur des faits qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer et qu'il n'a pas révélés à l'acheteur,
Devant la cour elle excipe de deux fondements : d'une part, la violation du devoir de conseil pour la carte P6DNF avec un seul connecteur, d'autre part, l'inexécution de l'obligation de délivrance conforme de la carte P6DNF avec deux connecteurs,
Le manquement à l'obligation de conseil que la jurisprudence impose au fabricant, fut-ce à l'égard d'un acheteur professionnel, résulte de l'aveu fait en octobre et novembre 1998 par S... de ce qu'elle connaissait depuis longtemps les problèmes constatés par DIG..., comme de l'absence de toute préconisation ou mise en garde,
Le manquement à l'obligation de délivrance résulte de l'absence de livraison d'une carte mère conforme à sa destination et à ses potentialités étant précisé que l'article 36 de la Convention de Vienne admet la responsabilité du vendeur même si le défaut de conformité apparaît après le transfert des risques,
Outre les violations des articles 1604 et 1615 du code civil et la circonstance que la Convention de Vienne n'enferme l'obligation de conseil et d'information dans aucun délai, les dispositions de l'article 40 de cette convention font obstacle à ce que S... puisse se prévaloir de celles des articles 38 et 39 de cette même convention ;

S... qui a identifié dès 1996 la non conformité affectant ses cartes a celé à DIG... la correction à laquelle elle avait immédiatement procédé sans qu'elle puisse se prévaloir de l'avis précipité qu'aurait émis son propre technicien pour réparer sa faute, ni de ce qu'elle n'était pas tenue à l'égard de DIG... d'un devoir d'information, puisque celle-ci, si elle est acheteur professionnel, ne fait qu'assembler des composants et ne peut savoir qu'un seul connecteur est insuffisant pour recevoir une quantité de courant déterminé, étant précisé que le devoir d'information se prolonge lors de l'exécution du contrat,

Contrairement à ce que prétend S..., le tribunal, homologuant le rapport de l'expert judiciaire, en retenant que cette dernière n'a pas informé DIG... des limites de ses cartes dont sont résultés les dysfonctionnements constatés, a retenu et qualifié la faute de S... consistant dans l'inexécution du devoir de conseil et de mise en garde sur la carte ne comportant qu'un seul connecteur et un manquement à l'obligation conforme pour ne pas avoir délivré la carte conforme aux possibilités fonctionnelles d'utilisation comportant deux connecteurs,

Vainement S... excipe de ce que DIG... aurait invoqué un nouveau fondement, eu égard aux dispositions de l'article 565 du NCPC,

Le délai de garantie est étranger à la violation de l'obligation de conseil étant précisé que S..., qui seule en connaissait les conditions d'utilisation, savait, alors que ces cartes sont conçues pour cette destination, que DIG... intégrerait celles-ci dans des systèmes serveurs et stations de travail,

Au demeurant le manuel d'utilisation s'il fait référence à "SUPER P6 DNF / P6 SNF, ne fait aucune mention de la société S... M... COMPUTER INC avec laquelle DIG... a seule contracté ,

En outre la clause exonératoire écarte les dommages directs en contradiction avec les dispositions du code civil tandis qu'elle ne peut, sous peine d' être réputée non écrite par le juge, éluder la responsabilité et que le débiteur qui a commis une faute lourde ou dolosive ne peut s'en prévaloir,

En l'espèce S... s'est livrée à des manoeuvres dolosives, en indiquant de manière éhontée dans son mail du 25.11.1998 n'avoir pas découvert le problème avant 15 mois après avoir lancé la carte P6DNF, alors d'une part, que le 15.10.1998 elle avait précisé avoir installé les connecteurs J 208 et J 31 sur la carte mère ce qui augmentait la quantité de courant pouvant être délivrée à la carte mère, d'autre part, qu'elle avait indiqué à l'expert, avoir entrepris de modifier le dessin de ses cartes dès 1996, en développant trois versions successives, la deuxième n'ayant pas été commercialisée, la troisième comportant un second connecteur figurant dans le catalogue 1996 des cartes mères S..., et S... ayant indiqué avoir produit ces dernières cartes dès 1996 tout en livrant à DIG..., à laquelle elle dissimulait les corrections ainsi apportées, tout au long de l'année 1997, les cartes de la première génération ;

Considérant, au vu des pièces produites que :

La S.A. DIG... qui a pour activité la mise en oeuvre de solutions informatiques à partir de composants informatiques a commandé pour satisfaire ses propres clients à la société S... INC de droit américain plusieurs centaines de cartes mères qui lui ont été livrées entre mai 1996 et décembre 1997,
Courant octobre 1998, à la suite de reproches que lui avaient faits ses propres clients, la S.A. DIG... s'est plaint auprès de son fournisseur, certaines cartes ayant eu leur connecteur brûlé ;
Une expertise a été ordonnée suivant ordonnance du 16.02.1999 du président du tribunal de commerce de BOBIGNY,
Après avoir déposé un prérapport le 03.11.1999, Monsieur D..., expert judiciaire a déposé son rapport le 15.10.2001 qui a été suivi à la demande du président du tribunal de commerce de BOBIGNY d'un rapport complémentaire déposé le 31.12.2001,

Il ressort notamment du rapport du 15.10.2001 que :

Si seules certaines cartes sont défectueuses, leur connecteur ayant brûlé provoquant le dysfonctionnement de l'installation il y a lieu de remplacer la totalité de ces cartes et notamment plusieurs centaines de cartes encore en service en raison des risques encourus,
L'origine du désordre vient de ce que la société S... n'ayant pas avisé des limites d'utilisation de ces cartes et en particulier de la puissance de l'alimentation maximum que le contacteur pouvait supporter, il en est résulté une brûlure du connecteur entraînant la défaillance de la carte et l'arrêt de l'alimentation correspondante,
Il est probable que les configurations utilisées en France sont plus chargées que celle utilisées aux ETATS UNIS ce qui n'a pas été suffisamment pris en compte, mais le problème subsiste pour toutes les configurations où la S.A. DIG... a installé les cartes,
Dans son rapport du 31.12.2001, l'expert judiciaire a conclu en ces termes :
II apparaît au travers des analyses que nous venons de présenter que la société DIG... a acheté entre mai 1996 et janvier 1998 un ensemble de 45 cartes mères dont 21 ont vu leur connecteur brûler.
Cette panne a surpris à la fois la société S... et la société DIG... . Cette dernière n'avait pas été avertie d'une quelconque limitation de la puissance d'alimentation de la carte mère S... .
Les seules contraintes dont elle avait été avertie concernaient le respect de la norme AT ; aussi bien pour la partie femelle des connecteurs que pour la fourniture des alimentations ; DIG... a respecté ses contraintes.
En cours d'expertise une autre contrainte est apparue correspondant au fait que l'unique connecteur implanté par S... sur ces cartes mères était constitué de quatre broches, chacune d'entre elles ne pouvant supporter plus de 25 watts. Or les configurations mises en place par DIG... peuvent consommer jusqu'à 73,5 watts.
Il apparaît ainsi que si la consommation électrique est bien répartie sur les quatre broches du connecteur, alors le connecteur peut supporter jusqu'à 100 watts sans être endommagé ce qui a été le cas de 411 cartes mères sur les 445 cartes mères achetées.
Par contre s'il n'y a pas d'équi répartition sur les quatre broches, il y a danger de brûlure et c'est sans doute ce qui a pu se produire pour les cartes mères dont le connecteur a brûlé et qui sont à l'origine du litige.
On comprend alors les craintes que peut nourrir DIG... devant la nécessité de faire évoluer les configurations de ses clients.

Rappelons enfin que la solution préconisée par S... elle même a été de mettre sur les cartes un deuxième connecteur pour diviser le flux électrique d'alimentation et diminuer ainsi le risque de brûlure des connecteurs.
Dans le cadre des opérations d'expertise la société S... avait fait établir des études techniques et rapport amiable notamment par le laboratoire californien EXPONENT (rapport du 04.08.1999), le cabinet LCA (rapports des 04.02 et 12.04.2000 et du 27.12.2001) et le laboratoire ISEP.

Considérant que les obligations des parties découlent en l'espèce de la seule Convention de Vienne du 11.04.1981, s'agissant d'une vente internationale de marchandises, ce qui n'est pas discuté, entre deux pays signataires de cette convention, en sorte que sont dénuées de portée toute référence aux dispositions du code civil ;

Considérant que ladite convention, stipule notamment en sa section II "Conformité des marchandises et droits ou prétentions des tiers" :

Article 35

1- le vendeur doit livrer les marchandises dont la quantité, la qualité et le type répondent à ceux qui sont prévus au contrat, et dont l'emballage ou le conditionnement correspond à celui qui est prévu au contrat.

2- à moins que les parties n'en soient convenues autrement, les marchandises ne sont conformes au contrat que si :
a ) elles sont propres aux usages auxquels serviraient habituellement des marchandises du même type ;
b ) elles sont propres à tout usage spécial qui a été porté expressément ou tacitement à la connaissance du vendeur au moment de la conclusion du contrat sauf s'il résulte des circonstances que l'acheteur ne s'en est pas remis à la compétence ou à l'appréciation du vendeur ou qu'il n'était pas raisonnable de le faire ;
c) elles possèdent les qualités d'une marchandise que le vendeur a présentée à l'acheteur comme échantillon ou modèle ;
d ) elles sont emballées ou conditionnées selon le mode habituel pour les marchandises du même type ou, à défaut de mode habituel, d'une manière propre à les conserver et à les protéger ;

3 - le vendeur n'est pas responsable, au regard des alinéas a p) à d) du paragraphe précédent, d'un défaut de conformité que l'acheteur connaissait ou ne pouvait ignorer au moment de la conclusion du contrat.

Article 36

1- le vendeur est responsable, conformément au contrat et à la présente convention de tout défaut de conformité qui existe au moment du transfert des risques à l'acheteur, même si ce défaut n'apparaît qu'ultérieurement.

2- le vendeur est également responsable de tout défaut de conformité qui survient après le moment indiqué au paragraphe précédent et qui est imputable à l'inexécution d'une quelconque de ses obligations, y compris à un manquement à une garantie que, pendant une certaine période, les marchandises resteront propres à leur usage normal ou à un usage spécial ou conserveront les qualités ou caractéristiques spécifiées ;

Article 39

1- l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au vendeur, en précisant la nature de ce défaut dans un délai raisonnable à partir du moment où il l'a constaté ou aurait dû le constater.

2- dans tous les cas , l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au plus tard dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises, à moins que ce délai ne soit incompatible avec la durée d'une garantie contractuelle.

Article 40

Le vendeur ne peut se prévaloir des dispositions des articles 38 et 39 lorsque le défaut de conformité porte sur des faits qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer et qu'il n'a pas révélés à l'acheteur.

Considérant que quelle que soit la cause technique des dysfonctionnements des cartes mères, ceux-ci, tels qu'allégués se rattachent au point de savoir si les cartes mères étaient affectées d'un défaut de conformité, au sens de la Convention de Vienne des cartes mères vendues ;

Considérant qu' iln'est pas contredit que toutes les factures se référant aux commandes de cartes mères passées entre le 21.05.1996 et 01.12.1997 réduisaient la durée de cette garantie à un an, pièces et main d'oeuvre ;

Considérant qu'il n'est pas utilement contredit que la S.A. DIG... connaissait dès la commande cette limitation de la durée de la garantie étant précisé, que s'agissant de commandes successives , cette limitation ne pouvait être, en tout état de cause, méconnue dès la deuxième livraison ;

Considérant qu'il n'est pas discuté que si dix cartes mères ont été livrées le 01.12.1997, elles ne figuraient pas parmi celles dont le connecteur avait brûlé, les dernières livraisons faites précédemment remontant en avril 1997, et la première réclamation remontant au mois d'octobre 1998,

Considérant qu'il est produit aux débats un manuel d'utilisation SUPER P6DNF/P6SNF ;

Considérant qu'est vaine l'argumentation tirée de ce que ce manuel ne ferait aucune référence à la société S... COMPUTEUR INC, dès lors qu'il est constant que l'indication SUPER PC DNF / P6 SNF se rapporte aux cartes litigieuses que fabriquait la société S... ;

Considérant que, il n'est pas contesté que le manuel d'utilisation SUPER P6DNF et SUPER P6 SNF remis lors de la première livraison contenait une clause de limitation de garantie, en langue anglaise, mais dont la traduction fournie par S... n'est pas discutée, était rédigée en ces termes : "en aucun cas, le vendeur ne sera responsable des dommages directs, indirects, spéciaux, incidents, ou immatériels résultant d'un usage ou d'un défaut de conformité du produit ou de la documentation , même s'il était informé d'un tel dommage ( - - - )" ;

Considérant que le manquement à l'obligation de conseil et d'information, tel qu'il est allégué par DIG... consiste, d'une part, en l'absence de préconisation fournie lors des commandes initiales quant aux limites de la carte mère, d'autre part, dans le défaut de révélation par cette société pour les commandes ultérieures de la découverte de cette contrainte et des corrections apportées par l'élaboration de cartes mères disposant d'un connecteur supplémentaire, en sorte qu'un tel manquement, en l'espèce se rattache à l'évidence au défaut de conformité au sens ou l'entend la Convention de Vienne qui englobe le vice technique, tel qu'il ressort des dispositions précédemment rappelées, et qu'il s'en suit que cette obligation de conseil et d'information, se rattache à ce défaut de conformité lui même et lui est inhérent, ce qu'admet DIG..., elle même, puisqu'elle présente cette obligation comme accessoire à l'obligation de délivrance, dont s'évince que les délais de garantie définis à l'article 39 de la convention avec la restriction que lui apporte l'article 40 de cette même convention sont applicables à cette obligation, ce que confirme la nature du délai préfix qui commence à courir à la date à laquelle les marchandises ont été remises ;

Considérant que, par application de la Convention de Vienne, les clauses limitant la durée de la garantie ou exonératoires de responsabilité sont valables entre professionnels, ce que ne contredit pas utilement la société DIG... qui se borne à exciper des dispositions et de la jurisprudence applicables en droit français ;

Considérant que, au sens de cette convention les deux sociétés en cause avaient à l'évidence la qualité de professionnels, la société venderesse étant une société commerciale ayant pour objet notamment de fabriquer les cartes mères informatiques et la S.A. DIG..., une société commerciale mettant en oeuvre des solutions informatiques à partir de composants ;

Considérant que, pour s'opposer, en l'espèce à la clause précitée, la société DIG... invoque les manoeuvres dolosives commises, et résultant de la connaissance par S... du sous dimensionnement électrique ;

Considérant que ces manoeuvres dolosives doivent s'apprécier en l'espèce au regard des dispositions de l'article 40 de la Convention de Vienne, précédemment rappelées et qui évoquent la circonstance que le défaut de conformité porterait sur des faits connus du vendeur ou qu'il ne pouvait ignorer et qu'il n'a pas révélés à l'acheteur, tandis que la Convention de Vienne ne fait peser sur le vendeur professionnel aucune présomption de connaissance de défaut de conformité en sorte qu'il incombe à l'acquéreur d'établir que ce vendeur avait la connaissance tant de l'usage et de la destination du produit acquis que de la non conformité alléguée ;

Considérant que dans un e- mail du 15.10.1998, le service technique de S... a indiqué, répondant aux interrogations de la S.A. DIG... que :
"les connecteurs AT P6 et P9 du bloc d'alimentation et le connecteur d'alimentation J 20 à la carte mère sont des standards de l'industrie (informatique) qui peuvent supporter seulement 15 ampères en continu sans échauffement et générer les problèmes que vous constatez. La P6 DNF peut recevoir de nombreuses extensions et, avec le design double processeurs de la carte, cette limitation en courant peut être dépassée dans un système rempli d'unités (---),
C'est pour cela que nous avons installé les connecteurs J 208 et J 31 sur la carte mère, cela augmente la quantité de courant pouvant être délivrée à la carte mère. J 208 est un connecteur d'alimentation 5 volts additionnel, lequel utilisé en conjonction avec P8 et P 9 augmente la puissance de l'alimentation 5 volts de 75 % ( - - ),

Considérant que dans un dire adressé à l'expert le 01.09.1999 la société S... a indiqué, ce qui ne contredit pas les termes de l'e.mail ci-dessus rapportés :
L'historique de production de cartes mères type P6DNF révèle que deux générations de cartes mères type P6 DNF ont été commercialisées.
P6 DNF REV 1
Les premiers exemplaires de cette carte ont été produits le 30.04.1996
P6 DNF REV 2
Cette carte est restée au stade de prototype et n'a jamais été commercialisée
P6 DNF REV 3
Les premiers exemplaires de cette carte ont été produits le 18.11.1996

Suite à des demandes de clients, OEM désirant mettre en oeuvre des configurations spécifiques de forte puissance, la société S... a fait évoluer le dessin de la carte mère P6 DNF en prévoyant sur la carte de circuit imprimé un emplacement permettant d'implanter un connecteur d'alimentation supplémentaire.

Ce connecteur pouvait être implanté dès le stade de la fabrication si la société S... en donnait l'instruction ou par des techniciens SAV de la société S... si le client en faisait la demande a posteriori ;

Pour une raison de rationalisation de la production et de mercatique, vu le faible coût unitaire que représente le connecteur d'alimentation, la société S... décide de monter en sjrie à partir du deuxième semestre 1997 ce connecteur qui était jusqu'alors optionnel ;
(...)

En fait les prototypes de cartes P6 DNF REV 3 ont été réalisés en juillet 1996 : même si leur production n'a commencé qu'après cette date, ils ont bien logiquement servis à illustrer le catalogue que préparait la société S... pour le COMDEX qui s'est tenu en novembre 1996 ;

Considérant que ces manoeuvres dolosives n'ont pas été en l'espèce caractérisées, dès lors, d'une part, que pour chacune des livraisons la S.A. DIG... s'est bornée à former ses commandes sur catalogue sans soliciter un conseil spécifique du vendeur tandis que ces commandes dans ce domaine soumis à forte évolution technologique se sont étalées sur une période relativement longue en sorte qu'il incombait à cet acheteur de s'informer, ne serait-ce en se procurant le dernier catalogue, de l'état de dernières commercialisations de la société S..., d'autre part, qu' il ne résulte d'aucune pièce que lors de la fabrication de la première version de ces cartes et des premières livraisons S... connaissait les limites d'utilisation de ces cartes, de troisième part, que l'on ne saurait déduire de la circonstance que certains clients auraient sollicité des cartes de plus forte puissance la connaissance du risque de brûlure de ces cartes, de quatrième part, que l'on ne saurait rien tirer de la fabrication d'un prototype d'une deuxième version de ces cartes quant à ce risque, de cinquième part, que si une troisième version de ces cartes avec deux connecteurs a été commercialisée en novembre 1996, celle-ci n'a pas été pour autant dissimulée dès lors qu'à cette date, la société DIG... n'avait fait état d'aucun incident, et que cette nouvelle version figurait dans le catalogue 1996 ;

Considérant qu' il s'ensuit qu à raison tant des clauses de limitation de la durée de la garantie que des stipulations d'exonération de responsabilité dont s'agit, la S.A. DIG... est irrecevable en toutes ses demandes ;

Considérant que l'équité commande de condamner la S.A. DIG... à payer une somme de 9.000 EURO à la société S... au titre de l'article 700 du NCPC ;

Considérant que la S.A. DIG... est condamnée aux entiers dépens de première instance en ce compris les frais d'expertise judiciaire et d'appel, dont il est fait masse, le jugement étant donc réformé en ses dispositions relatives aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement,
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
Dit irrecevable la S.A. DIG... en toutes ses demandes ;
Condamne la S.A. DIG... à payer la somme de 9.000 EURO à la société S... au titre de l'article 700 du NCPC ;
Condamne la S.A. DIG... aux dépens de première instance qui comprendront les frais d'expertise judiciaire et d'appel ;
Admet la SCP B... G... au bénéfice de l'article 699 du NCPC.}}

Source

Published in original:
- available at the University of La Sarre website, http://witz.jura.uni-sb.de/}}